Catherine de Médicis

Collection Leurs Figures
Gallimard
Parution
En dehors des légendes déformatrices, inventées par les haines des partis et qui ont construit même pour nous, avec l'aide d'Alexandre Dumas et de Michelet, le sombre personnage de Catherine de Médicis, Jeanne Galzy vient de dégager une physionomie plus humaine.
Cette reine demi-florentine, mais aussi demi-auvergnate, venue en France à l'âge de quatorze ans, élégante, plus blonde que brune, et, dans sa maturité, débordante de belles chairs et de santé, est plus de chez nous qu'on n'imagine. Le bon sens et le sens pratique sont ses qualités. Elle voit juste, de son œil clair, et corrige les élans de ses sympathies par sa conscience des réalités. Ni monstre ni grand homme d'État, hésitante et pourtant tenace, éprise d'art et de pompe, grande travailleuse, avide de richesse et de pouvoir, astucieuse au besoin, beaucoup moins cruelle qu'on ne l'est de son temps, pacifique par goût de tranquillité, sans véritable foi en rien, superstitieuse plus que quiconque, elle traverse, de François 1ᵉʳ à Henri Ill, une des périodes les plus séduisantes et les plus atroces de notre histoire.
C'est l'époque des Dames galantes de Brantôme et des bûchers de l'Inquisition, des belles fêtes dans les jeunes châteaux de la Loire et des horreurs de la plus sauvage des guerres civiles. Pendant cinquante cinq ans, de son adolescence à sa vieillesse, Catherine de Médicis a vécu au milieu des intrigues d'amour, des querelles des partis, des disputes théologiques, des tragédies politiques. Elle a vu Paris menacé par l'invasion étrangère, ensanglanté par les luttes religieuses, perdu pour son fils par le soulèvement des ligueurs. Tantôt emportée par les événements, tantôt essayant de les diriger à force d'habilité et de souplesse, elle n'est point, malgré ses chevauchées guerrières, un être d'audace. C'est une femme. Souvent même une femme humiliée. Traitée de haut dès son arrivée en France par une cour qui méprise en elle le sang des banquiers florentins, dédaignée par son mari Henri II soumis aux charmes de Diane de Poitiers, elle apprend de bonne heure à ronger son frein. Veuve à quarante ans, obligée de défendre l'héritage de ses sept enfants contre toutes les ambitions, il faut qu'elle s'incline encore sous le joug des Guise. C'est souvent malgré ses façons royales et son rire bien portant, une femme malheureuse, déchirée par les rivalités de ses enfants, déçue jusque dans sa passion pour Henri III, son fils préféré. Loin de faire figure de bourreau, elle semble souvent victime. Même quand elle tue, elle se débat. Ses crimes, – et parmi eux l'épouvantable Saint-Barthélemy – ne sont que des résolutions de traquée.
C'est cette existence dramatique que nous présente Jeanne Galzy. Après une information d'historien, elle a usé du pouvoir du romancier. Son livre donne une Catherine de Médicis vivante. Il la suit le long des étapes de son existence. Il ressuscite la foule si colorée des êtres qui furent ses contemporains. Il évoque des décors. Il restitue l'atmosphère d'un temps où, tandis que la Reine Margot change d'amants et Henri III de mignons – la France dans la désorganisation aspire à un ordre nouveau. Il rend présent un des plus tragiques tournants de notre histoire.