Trente et un sonnets

Préface de Louis Aragon
Collection Blanche
Gallimard
Parution
«... Prenez un poète comme Guillevic, qui s'est fait place dans l'estime du Paris des années 40, qu'on loue pour sa réserve, un langage elliptique et précis, la parfaite absence de la rime, le respect de la tradition récente : qu'il se risque à ce jeu décidé, le sonnet alexandrin, cela va, cela peut encore aller, si c'est un jeu, une manière de défi, un ricanement, en un mot s'il n'y croit pas. Mais, s'il y croit, il se déshonore. Telle est la morale qui a cours.
Guillevic était devant ce risque paradoxal. Ce risque qui jette un jour sur les abîmes de la pensée poétique contemporaine, du goût de la mode, de la terreur en un mot qu'y font régner ceux-là mêmes qui surent définir cette terreur très particulière. Mais cette terreur-là ne se borne pas à ses inventeurs. Elle est aidée par toute sorte de gens, et des meilleurs. Des meilleurs, j'entends aussi bien poétiquement que politiquement, et on me pardonnera d'en juger d'où je suis. Cette terreur a force de loi dans les milieux progressistes, comme on dit. Il fallait donc que Guillevic acceptât d'avouer que c'était un jeu, qu'il n'y croyait pas.
Or, il y croyait. C'était le contraire d'un jeu...» (Extrait de la préface d'Aragon.)