Jacques Aron
I
Votre tour viendra
Collection Blanche
Gallimard
Parution
Jacques ouvre les yeux. Paix. Tout est à sa place. Jean dort, et Mathilde aussi. Il y a des forêts qui l’appellent, et le soir qui tombe sur Ies lacs et les glaciers de Suisse… Il cueille, il cueille des fleurs, les arbres sont à lui, le coucou chante, il entre peu à peu dans son Royaume.
Cependant, sur la table du père, les journaux et les bulletins d’agences s’accumulent. On se bat au Mexique et dans les Balkans. M. Walden revient d’Allemagne. Les amis, le long du sentier de Bürgenstock, parlent des catastrophes prochaines.
Ce livre est autant celui du père, Daniel, que du fils, Jacques. N’y a-t-il pas eu, parmi ceux qui avaient grandi et vécu dans l’Europe d’avant-guerre, et largement profité d’elle, des hommes que le conflit mondial toucha secrètement et abattit? Cet ordre, en quoi Daniel Aron avait cru et auquel il était attaché par mille liens, où il avait installé son bonheur triomphant, ou plutôt celui des siens, s’écroule dans la boue et le sang. Présent et avenir, il les aperçoil également sombres, sans lueur ni justification.
Le Paris de la Guerre, les rues, le lycée mobilisé, la classe mobilisée, les raids, la Bertha, la bêtise, les caves et les affiches à «poilus», le bachot, les dessins obscènes sous les pupitres, dans la ville la course à l’amour, le père Noiraud et sa scolastique… Au milieu de tout cela, la famille, enfants, mère, père, la mort en lui.
Chez Jacques déjà des puissances spirituelles s’étirent, grandissent, exigent. En même temps qu’au drame paternel, nous assistons à l’éveil de l’enfant, de son désir impuissant dans un milieu sans âme. Il se sent pris dans une machine implacable, enveloppé d’un complexe de réalités, d’habitudes, de sentiments organisés, plus forts que lui. La hantise de ces Choses, qu’il ne comprend pas, le gagne peu à peu. Désespoir.
Le père est malade. Il faut partir pour Nice. Le Chemin des Cigales. Les grillons chantent. Comme les hommes peuvent changer en quelques mois… Daniel Aron meurt. Rencontre de Jacques et de la mort. Une femme délicieuse, Germaine, avait essayé de lui faire regarder la vie. Il retombe. Son tour viendra.
Ce livre est autant celui du père, Daniel, que du fils, Jacques. N’y a-t-il pas eu, parmi ceux qui avaient grandi et vécu dans l’Europe d’avant-guerre, et largement profité d’elle, des hommes que le conflit mondial toucha secrètement et abattit? Cet ordre, en quoi Daniel Aron avait cru et auquel il était attaché par mille liens, où il avait installé son bonheur triomphant, ou plutôt celui des siens, s’écroule dans la boue et le sang. Présent et avenir, il les aperçoil également sombres, sans lueur ni justification.
Le Paris de la Guerre, les rues, le lycée mobilisé, la classe mobilisée, les raids, la Bertha, la bêtise, les caves et les affiches à «poilus», le bachot, les dessins obscènes sous les pupitres, dans la ville la course à l’amour, le père Noiraud et sa scolastique… Au milieu de tout cela, la famille, enfants, mère, père, la mort en lui.
Chez Jacques déjà des puissances spirituelles s’étirent, grandissent, exigent. En même temps qu’au drame paternel, nous assistons à l’éveil de l’enfant, de son désir impuissant dans un milieu sans âme. Il se sent pris dans une machine implacable, enveloppé d’un complexe de réalités, d’habitudes, de sentiments organisés, plus forts que lui. La hantise de ces Choses, qu’il ne comprend pas, le gagne peu à peu. Désespoir.
Le père est malade. Il faut partir pour Nice. Le Chemin des Cigales. Les grillons chantent. Comme les hommes peuvent changer en quelques mois… Daniel Aron meurt. Rencontre de Jacques et de la mort. Une femme délicieuse, Germaine, avait essayé de lui faire regarder la vie. Il retombe. Son tour viendra.