Maternelles

Au catalogue de l'éditeur depuis 2005
Collection Verticales
Gallimard
Parution
Maternelles se compose de chapitres d’inégales longueurs. Chacun se développe à partir de situations élémentaires et a priori hétérogènes : un jeune garçon a la fièvre ; un adolescent grimpe sur un rocher qui domine une vallée ; un enfant et sa mère (puis un homme et sa compagne) roulent en voiture ; un rituel chamaniste ; un extrait de lettre d’une mère à son fils ; un adulte ayant la fièvre revoit son enfance.
Ces évocations fragmentaires, tels de petits écosystèmes, se situent généralement dans un espace restreint (une chambre, une voiture, un paysage...). Le temps de l’ensemble, en revanche, demeure indéterminé. À l’échelle du roman entier, il pourrait s’agir d’un seul moment où s’inscrivent en parallèle plusieurs personnages, ou bien de plusieurs moments, réels ou fantasmés, concernant la vie d’un seul personnage masculin, saisi à plusieurs stades de son existence. Mais entre ces différentes périodes romanesques – celle de l’enfance, de l’adolescence, et de l’âge adulte –, il y a moins un personnage qu’un agent de liaison : la fièvre. Car c’est à partir d’une fièvre enfantine, des hantises primordiales d’un petit garçon alité, que Patrick Chatelier laisse libre cours à un imaginaire peuplé d’Amérindiens, d’Égyptiens, de colonies de fourmis, de pierres totémiques. Comme si le livre entier était le fruit de cet état d’hallucination. Mais à peine se persuade-t-on qu’il s’agit des simples fantasmagories d’un gamin malade, qu’on se met à douter. Et si c’était l’enfant fiévreux qui n’était qu’un reflet, une reconstruction mémorielle, selon ce principe cher à l’auteur : «Tchouang-Tseu, s’éveillant après avoir rêvé qu’il était un papillon, se demande s’il n’est pas un papillon rêvant qu’il est Tchouang-Tseu.»
Avec Maternelles, Patrick Chatelier poursuit le travail très singulier entamé avec Infiniment petit, celui d’une écriture en perpétuelle métamorphose qui s’immerge dans l’intimité des êtres et des choses. Tout le contraire d’un réalisme donc, puisque c’est dans les mues de la langue que la réalité s’altère, s’hallucine et se remémore au présent.