Le Colombier de Puyvert

Gallimard
Parution
On retrouve dans Le colombier de Puyvert les personnages picaresques méditerranéens chers à Gabriel Audisio, tels qu'on les rencontrait déjà dans Les compagnons de l'Ergador.
Sauveur, chef d'une petite bande de sympathiques aventuriers, les avait menés à travers mille péripéties, des environs de Marseille à la Corse, en passant par les Baléares et l'Algérie.
Dans ce nouveau roman, nos aventuriers vont aller de la Corse à la Grèce, en passant par l'île d'Elbe, Piombino, Naples, Brindisi... Que cherchent-ils donc? Une île. Quelle île? Une île où ils pourront vivre librement, sans contraintes légales. Autant dire une chimère...
Ils s'en apercevront quand ils auront finalement échoué sur le pauvre îIot de Cratéros-Ia-Fenouillère, perdu au fond de l'archipel des Cyclades, après avoir traversé des aventures d'un comique souvent truculent.
Alors le climat du livre se transforme. Sauveur voit se défaire la communauté fraternelle dont il avait rêvé, il voit mourir d'abord le vieux Cuscute, un érudit semble-fou qui représentait peut-être le dernier exemplaire de la fantaisie individualiste. Il voit mourir ensuite sa propre mère, qui représentait la vieille sagesse provençale.
Nous sommes en 1932. Le monde entre dans sa grande division. Des compagnons de Sauveur, les uns vont vers les milices totalitaires, les autres vers la révolution prolétarienne. Et Sauveur reste seul, provisoirement du moins. Il devient l'image même de l'intellectuel qui ne peut pas encore «choisir». Dans une ardente méditation, au creux du colombier de Puyvert déserté des oiseaux (ce colombier existe bel et bien du côté du Luberon), Sauveur cherche passionnément à résoudre ses contradictions, à retrouver cet équilibre propre au génie méditerranéen, qui sauvera peut-être le monde, cette «pensée de midi» comme dit Camus, de « midi-le-juste» comme disait Valéry, qu'Audisio Iui-même a cherchée dans ses essais.
Pourtant la gravité de cet épilogue n'est nullement pessimiste. La confiance en l'homme demeure intacte. Nul doute qu'à l'heure de la vérité, Sauveur sera «du côté de l'homme»... Et les lecteurs seront sans doute sensibles au ton de cet ouvrage, qui, indifférent à la mode, mêle le rire le plus franc aux chagrins les plus purs, et qui fait preuve, au total, d'une excellente santé morale.