En savoir plus sur la collection Du Monde entier
« Du Monde entier » est la principale collection de littérature étrangère des Éditions Gallimard. Dotée d'un fonds exceptionnel et demeurée fidèle aux grands noms de la littérature mondiale de ces dernières décennies (Roth, Bellow, Fuentes, Vargas Llosa, De Luca…), elle favorise depuis sa création l'émergence et la reconnaissance en France de nouveaux talents, comme aujourd'hui Martin Amis, Ian McEwan, Zadie Smith, Arundhaty Roy, Manuel Rivas, Anna Hope… Le Liseur (Schlinck), Testament à l'anglaise (Coe), Sonietchka (Oulitskaïa), Pastorale américaine et La Tache (Roth), Trois chevaux et Montedidio (De Luca), Sourires de loup (Z. Smith), Le Dieu des Petits Riens (A. Roy), Mon nom est rouge (Pamuk), L'Amie prodigieuse d'Elena Ferrante figurent parmi les titres emblématiques de ces dernières années. On dénombre aujourd'hui, parmi les titres de la collection, environ 46 langues traduites et, parmi les auteurs, plus de 73 nationalités. Depuis 1993, un grand nombre de nouveautés paraissent revêtues d'une jaquette photographique, vivement colorisée et imprimée en bichromie.
« La curiosité cosmopolite marque la première vague NRF : Paul Claudel, Valery Larbaud, André Suarès, Saint-John Perse. Dès ses débuts, la NRF se veut Du Monde entier. » François Nourissier, Album NRF, Gallimard, 2000
D'hier à aujourd'hui
« Du Monde entier » est créé au printemps 1931. L'époque est à la littérature étrangère : les collections se multiplient et la NRF, notamment sous l'impulsion de Gide et de Larbaud, y consacre depuis la fin de la première Guerre une part toujours plus importante de son catalogue (Conrad, Dos Passos, Kafka, Svevo, Tagore…).
Jusqu'en 1950 toutefois, « Du Monde entier » ne s'adresse qu'aux seuls bibliophiles : n'y sont en effet réunies que les éditions originales de certaines traductions parues sous la couverture blanche. Ainsi Le Procès de Kafka, dans la traduction d'Alexandre Vialatte, préfacé par Bernard Groethuysen, paraît-il simultanément dans « Du Monde entier » (tirage de tête) et sous la couverture « Blanche » (édition courante). Mais ce n'est pas une loi : La Haine d'Heinrich Mann (1933), Victoriens éminents de Lytton Strachey (1933) ou encore Les Histoires de Jacob de Thomas Mann (1935) paraissent en « Blanche » en édition courante et en beaux papiers. Ce n'est qu'à partir de 1950 que la collection « Du Monde entier » prend son autonomie par rapport à la « Blanche », les ouvrages ne portant plus de numéros d'ordre à partir du 575e volume (1971).
Les débuts de la collection sont marqués par quelques grandes entrées dans le catalogue. Le domaine anglo-saxon s'enrichit de grandes figures sous l'influence prédominante de Maurice-Edgar Coindreau : Faulkner, Hemingway, Caldwell, Steinbeck. La découverte du premier est présentée en 1933, année de la publication de Sanctuaire, comme une « révélation de Malraux, prix Goncourt 1933 » (texte de la bande). Coindreau était en fait en relation avec Faulkner depuis mars 1931 ; il publiera en juin de la même année un premier article sur l'auteur dans La NRF et y donnera une traduction de Septembre ardent en 1932 (Une Rose pour Emily paraissant parallèlement dans Commerce). Il travaillera alors à la traduction deTandis que j'agonise. Mais les traductions françaises de l'auteur paraîtront dans un ordre différent de leur publication d'origine, malgré les efforts de Larbaud qui avait lui-même repéré Faulkner : Sanctuaire en 1933, avec une préface de Malraux (prépubliée dans La NRF), Tandis que j'agonise en 1934 dans la traduction de Coindreau, avec une préface de Larbaud, Lumière d'août en 1935, Le Bruit et la fureur en 1938. Les textes de Sartre sur Faulkner (notamment celui de juillet 1939 dans La NRF, repris dans Situations I, 1947) joueront un rôle important dans la réception de l'œuvre. À la suite de ses travaux sur Dos Passos et Faulkner, Coindreau sera sollicité par Gaston Gallimard pour la traduction des deux premiers romans d'Hemingway publiés à la NRF, dont L'Adieu aux armes, préfacé par Drieu la Rochelle (1932). Puis c'est au tour d'Erskine Caldwell d'attirer l'attention de Coindreau, qui entre en contact avec l'écrivain aux États-Unis en 1933 et publie successivement ses traductions du Petit Arpent du bon dieu (1936) et de La Route au tabac (1937). Enfin, en 1939, Coindreau donne à Gallimard sa traduction de Des Souris et des hommes, préfacé par Joseph Kessel, sans doute influencé dans ce choix par « la haute estime que Gide avait pour un de ses ouvrages écrit en 1936, In Dubious Battle, traduit [pour Gallimard] en 1940 par E. Michel Tyl sous le titre En un combat douteux ». Autant de publications décisives, qui marqueront à l'évidence deux décennies de « l'âge du roman américain » (1930-1950).
Première collection entièrement dédiée au domaine étranger, « Du Monde entier » n'entraîne pas la disparition de la littérature étrangère sous d'autres enseignes. De nouvelles collections sont créées : « Les Classiques russes » en 1935, suite aux rachats de la collection homonyme aux Éditions Jacques Schiffrin (La Pléiade), dirigée par Schloezer, en 1933 et de trente-quatre titres de la « collection russe » des Éditions Bossard en 1934 ; y seront publiés les traductions de Bounine, Dostoïevski (dont la NRF édite par ailleurs les œuvres complètes), Gogol, Gontcharov, Grébenschtchikov, Kouprine, Mérejkowski, Pouchkine, Tolstoï, Tourguéniev... « Les Classiques anglais » sont lancés quatre ans plus tard, publiant des œuvres d'Emily Brontë (Wuthering Heights), Dickens, Fielding, Thackeray... avant les « Classiques allemands » en 1941 : Eckhart, Goethe, Hoffmann... C'est également dans les années 1930 que des contacts sérieux commencent à être pris avec la littérature sud-américaine. Jules Supervielle saluait en 1932, dans les colonnes de La NRF, la parution en Argentine de Sur, la revue de son amie Victoria Ocampo, qui allait édifier un pont littéraire et éditorial entre les Amériques et l'Europe où se croiseraient Borges et Drieu, Eduardo Malleau et Henri Michaux... Invité par Victoria Ocampo à Buenos Aires en 1939, Caillois y créera un supplément de littérature française à Sur où seront publiés Breton, Malraux, Ponge... De ces premiers contacts découlera après-guerre la création de « La Croix du Sud ». Mais avait déjà paru le Don Segundo sombra de Guiraldes (1932) présenté par Supervielle et auparavant, Vision de l'anahuac d'Alfonso Reyes, présenté par Larbaud. Ce même Larbaud qui signalait dès 1925 dans La Revue européenne, avant Drieu et Michaux, le talent de Borges. Enfin, parallèlement à « Du Monde entier », Gaston Gallimard crée en 1931 « Les Essais », collection sans directeur déclaré, se voulant moins « documentaire et anecdotique » que « Les Documents bleus », et où les intellectuels étrangers seront, là aussi, largement représentés (Kierkegaard, Max Scheler, Martin Heidegger et Nicolas Berdiaev, avant-guerre).
Membres du comité de lecture et collaborateurs extérieurs, forts de leurs compétences linguistiques propres et de leur connaissance des littératures nationales, contribuent à enrichir « Du Monde entier », comme l'ont fait en leur temps André Malraux, Benjamin Crémieux, M.-E. Coindreau, Brice Parain, Raymond Queneau, Michel Mohrt, Dominique Aury, François Erval, Dionys Mascolo ou Yannick Guillou et, par la suite, Juan Goytisolo, Hector Bianciotti, Bernard Lortholary, Christine Jordis, Gustavo Guerrero, Vincent Raynaud, Semyon et Daniel Mirsky et Jean Mattern, qui a assuré la coordination de la collection jusqu'en 2016.
Julia Nannicelli est aujourd'hui en charge du domaine italien et méditerranéen, Alain Gnaedig des langues scandinaves, Gustavo Guerrero des domaines espagnol et portugais, Tiffany Gassouk des domaines anglophone et asiatique, Aurore Touya des territoires germaniques et d'Europe de l’Est ainsi que de la coordination des programmes.
Brèves
- Le premier roman de Faulkner traduit en France paraît dans la collection « Du Monde entier » en 1933 : Sanctuaire. Sur la bande ornant l'ouvrage, on peut lire : « Une révélation d'André Malraux, prix Goncourt, 1933 ».
- Les plus grands auteurs français portèrent la collection sur ses fonts baptismaux : Mac Orlan préface Döblin ; Malraux, Faulkner et le sulfureux Lawrence ; Supervielle, Ricardo Guiraldes ; et Drieu La Rochelle, Hemingway…
- La collection a changé plusieurs fois de maquette de couverture. Le logo actuel est un photographisme de Georges Guimbertaud adapté par le graphiste Massin en 1961.
- D'autres collections vouées à la littérature étrangère avaient précédé « Du Monde entier » à la NRF, comme « Jeunes russes » en 1926 ou la « collection polonaise » en 1929. De nos jours, plusieurs collections accueillent des textes étrangers, à l'image de « Continents noirs » pour le domaine africain et la « Série noire » pour les polars étrangers.
De nouvelles traductions
Régulièrement, la collection propose de nouvelles traductions de grands textes de la littérature étrangère : Lolita de Nabokov – Ulysse de Joyce – La Ferme africaine de Karen Blixen – Pedro Páramo de Juan Rulfo – Berlin Alexanderplatz de Döblin – Confession d'un masque de Yukio Mishima – Chroniques d'un enfant du pays de James Baldwin – Manhattan Transfert de Dos Passos – Les Raisins de la colère et Des souris et des hommes de Steinbeck – Mars de Fritz Zorn Le Docteur Jivago de Pasternak – L'Adieu aux armes d'Hemingway...
Quelques classiques de la collection
Amado. Bahia de tous les saints – Babel. Cavalerie rouge – Bernhard. Oui – Blixen. La Ferme africaine – Burroughs. Le Festin nu – Caldwell. Le Petit Arpent du bon dieu – Carpentier. Le Royaume de ce monde – Cortázar. Les Armes secrètes – Döblin. Berlin Alexanderplatz – Dos Passos. Manhattan Transfer – Durrell. Le Carrousel sicilien – Faulkner. Sanctuaire, Tandis que j'agonise, Sartoris (...) – Fitzgerald. Le Dernier Nabab – Fuentes. La Mort d'Artemio Cruz Handke. Le Colporteur – Hasek. Le Brave Soldat Chvéik – Hemingway. L'Adieu aux Armes, Le Vieil Homme et la mer, Pour qui sonne le glas (…) – Joyce. Ulysse, Dedalus (…) – Jünger. Sur les falaises de marbre – Kafka. Le Procès, Le Château, La Métamorphose (…) – Kundera. La Plaisanterie, La Valse aux adieux, L'Insoutenable légèreté de l'être (…) – D.H. Lawrence. L'Amant de Lady Chatterley – Vargas Llosa. La Ville et les Chiens – Mishima. Le Pavillon d'or (…) – Nabokov. Lolita (…) – Pasternak. Le Docteur Jivago – Pasolini. Poésies – Roth. Portnoy et son complexe – Strauss. La Dédicace – Steinbeck. Des souris et des hommes, Les Raisins de la colère, La Perle (…) – Styron. Le Choix de Sophie – Vassilikos. Z – White. Éden-Ville – Zamiatine. Nous autres… et tant d'autres !
Prix et distinctions
Une moisson de Nobel
Thomas Mann, Faulkner, Hemingway, Laxness, Pasternak, Steinbeck, Cholokhov, Asturias, Neruda, Patrick White, Eyvind Johnson, Montale, Bellow, Elytis, Milosz, Canetti, Golding, Brodsky, Cela, Paz, Ôe, Heaney, Pamuk, Herta Müller, Vargas Llosa, Kazuo Ishiguro, Peter Handke, Louise Glück.
Prix Pulitzer
Parabole et Les Larrons de Faulkner, Le Vieil Homme et la mer d'Hemingway, Les Confessions de Nat Turner de Styron, Rappel à Memphis de Peter Taylor, Rabbit est riche et Rabbit en paix de John Updike, Pastorale américaine de Philip Roth...
Prix Médicis étranger
La Vie est ailleurs de Kundera, Livre de Manuel de Cortázar, Le Jour de la comtesse de Shahar, Le Traité des Saisons de Bianciotti, Maîtres anciens de Bernhard, Aracoeli de Morante, Histoire qui fut heureuse, puis douloureuse et funeste de Citati, La Tache de Philip Roth, Nocturne italien d'Antonio Tabucchi, La Maison du sommeil de Jonathan Coe, Neige d'Orhan Pamuk, Sonietchka de Ludmila Oulitskaïa, Le Grand Quoi de Dave Eggers.
Prix Femina étranger
Mouflets de Susan Minot, Rouge décanté de Jeroen Brouwers, L'Enfant volé de Ian McEwan, Montedidio d'Erri De Luca, Ce qui reste de nos vies de Zeruya Shalev, Écrire pour sauver une vie de John Edgar Wideman, La Dépendance de Rachel Cusk.
Prix du meilleur livre étranger
La Tante Julia et le scribouillard de Vargas Llosa, À tout jamais de Graham Swift, Mon nom est rouge d'Orhan Pamuk, L'Histoire de l'amour de Nicole Krauss, Mes amis de Hisham Matar.
Création : 1931
Premier titre : Erich-Maria Remarque. Après [Der Weg zurück] (12 mai 1931)
Nombre de titres parus : 2475
Nombre d'auteurs édités : 915
Meilleures ventes :
Le Docteur Jivago de Boris Pasternak (1956)
L'Insoutenable légèreté de l'être de Milan Kundera (1987)
L'Amant de Lady Chatterley de D.H. Lawrence (1931)
L'Enfant perdue d'Elena Ferrante (2018)
Le Vieil Homme et la mer d'Ernest Hemingway (1952)
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© Éditions Gallimard, novembre 2024