Le Sacre de la Nuit

Trad. de l'anglais par Odile de Lalain
Gallimard
Parution
N'appartient plus au catalogue de l'éditeur depuis 
1999
De son écriture froide, précise, qui cherche à masquer d'un flegme et d'un humour tout britanniques la violence et l'horreur, Colin 'Wilson (devenu mondialement célèbre à l'âge de 22 ans, en 1960, avec son premier livre, un essai philosophique intitulé The Outsider) nous transmet aujourd'hui, en traduction, sa première tentative romanesque : eIle marque sans aucun doute une étape importante dans la carrière de l'un des principaux meneurs du groupe des «Jeunes hommes en colère».
Dans Le Sacre de la Nuit, il met à nu la psychologie de Gérard Sorme, jeune écrivain pauvre, passionnément en quête d'une vérité intérieure qui rejoindrait, au-delà d'inaccessibles dimensions, une certaine vérité du monde, une vérité de l'homme placé face au monde actuel en train de se défaire.
L'action proprement dite du récit compte peu : elle ne représente qu'une trame nécessaire au développement d'un drame intellectuel. Gérard Sorme rencontre par hasard Austin Nunne, riche noceur homosexuel. L'amitié surgit, immédiate parce qu'intuitive, mais baignée cependant d'angoissante obscurité. Le livre tout entier n'est que le lent dévoilement, par Gérard Sorme, à travers ses recherches personnelles et les mille recoupements des contacts humains, des sources de la funeste attirance qui, déjà, lie son sort au fuyant Austin. De nombreux personnages surgissent, disparaissent ; entre autres : un prêtre ; un photographe douteux attiré par les petites filles ; une adolescente cherchant l'amour ; des prostituées sauvagement égorgées dont on recherche l'assassin ; une virginale quadragénaire. Chacun d'eux, sans le savoir ni le vouloir, à l'aide de très légers déplacements dans le temps et l'espace (mots, signes, silences) permet peu à peu à Gérard Sorme de resserrer toujours davantage le réseau de ses présomptions. Et soudain, l'évidence éclate : Austin Nunne s'est réalisé lui-même dans le sadisme, Austin Nunne n'est autre que le monstrueux criminel poursuivi.
Et le roman, dont la fin n'est pas une fin comme dans toute réalité, marque pour le héros un émouvant instant de pause comme si, très mystérieusement, il venait de découvrir enfin que sa propre angoisse trouvait sens et définition dans le destin ambivalent et destructeur de son ami, son double.