Katia, le démon bleu du tsar Alexandre

Gallimard
Parution
« – Tu es un démon, tu n'es pas une fille!
Elle ne voulait pas le recevoir. Elle a crié : "À bas le Tsar!", elle a oublié le compliment qu'elle devait lui réciter. Elle avoue qu'elle a mené son poney dans la plate-bande pour abîmer l'inscription fleurie : Vive le Tsar. Ils font la paix. Ils dînent en tête à tête.
Vous pouvez m'appeler Katia! C'est elle qui permet ; c'est lui qui reçoit la permission. Par ces mots se termine la première conversation entre Catherine Dolgorouky, âgée de dix ans, et l'Empereur de Toutes les Russies, l'autocrate Alexandre II.
De cette première entrevue au château de Tieplovka où l'Emperenr est logé pour les grandes manœuvres, où le Prince Dolgorouky, malade, délègue sa fille pour faire les honneurs de la demeure ancestrale, va naître un amour qui bouleversera l'Europe et marquera un tournant fatal dans l'Histoire de Russie.
Je la briserai, cette gamine! C'est le chef de la Police Impériale, le Comte Shouvaloff, qui parle, quelques années plus tard, lorsque Catherine Dolgorouky est présentée à la Cour dans la ravissante nouveauté de ses seize ans, et que la passion de l'Empereur éclate à tous les yeux. Katia est de la race indomptable de ceux qui ont voulu la liberté du Peuple Russe. Un de ses ancêtres, le frère de la première Catherine Dolgorouky, la malheureuse fiancée du Tsar Pierre II, est monté sur l'échafaud ponr expier cette idée-là. L'Impératrice Marie est mourante. Toutes les forces de la réaction se liguent contre Catherine : le danger Katia menace l'autocratisme russe.
Mais Alexandre et sa petite bien-aimée triompheront. Ils sont réduits, pour se voir, à des rencontres sur les bancs des jardins publics. Leur passion en est grandie jusqu'au sublime. Les amours contrariées sont toujours les plus fortes. Ils entrent dans l'histoire de ces amants malheureux qui forment le fond de la poésie humaine. Mais la gamine aura raison de l'homme le plus puissant de l'Empire, après le Tsar : Shouvaloff est congédié. La Révolution gronde déjà dans les profondeurs de la Russie. Katia, toute générosité, toute amour, veut sauver l'Empire et l'Empereur. Elle veut à la fois son bonheur et celui du peuple Russe. Quand l'Impératrice mourra, n'écoutant que la hâte de son cœur, Alexandre épouse morganatiquement sa jeune maîtresse. Une proclamation est prête. Aussitôt que le deuil de Cour pourra être levé, le même jour, à la même heure, Katia sera couronnée Impératrice au Kremlin, et le Peuple Russe aura sa constitution. Mais la Police se venge, ou bien est-ce le Destin? On ne saura jamais s'il fallut à Katia accuser le ciel ou la terre de son malheur. La gamine sera brisée. Une bombe jetée par des anarchistes tue le Tsar Libérateur, peu de jours avant qu'il ait accompli sa mission. La veuve d'Alexandre II viendra se réfugier en France : elle y vivra en recluse de l'amour.