Train pour le Pakistan

Mano Majra
Trad. de l'anglais (Inde) par Maurice Beerblock
Gallimard
Parution
Dans l'Inde, depuis des siècles, Hindous et Sikhs vivaient en paix, côte à côte. En 1947, le projet de partage du pays en Inde hindoue et Pakistan mahométan déclenche, dans la province frontière du Pendjah, de tragiques émeutes.
Pour échapper aux massacres, aux viols, aux tortures sadiques, des paysans sikhs et hindous abandonnent leurs biens et fuient vers l'est, à pied, dans des camions, dans des chariots traînés par des bœufs, des trains surchargés de grappes humaines.
Ces lamentables exodes se heurtent à d'autres essaims de musulmans fuyant vers l'ouest. Les uns et les autres sont parfois victimes du hold-up de bandes armées de pillards qui, après avoir tout massacré, font faire demi-tour aux wagons chargés de cadavres.
Au cours de l'été, c'est-à-dire dès la création du nouvel État pakistanais, les fuyards se comptent par millions, et plus d'un million a déjà péri. Pourtant dans Mano Majra, village voisin de la frontière, la vie a continué comme autrefois, le gardien du temple sikh et le mollah de la mosquée exerçant encore paisiblement leur office. Un mauvais garçon du village, un Sikh du nom de Youggout, d'une force et d'une stature peu communes, a pour maîtresse une jeune musulmane, Nooro, la fille du mollah. Un acte isolé de banditisme, qui coïncide avec l'arrivée à Mano Majra d'un délégué du peuple, nommé Iqbal, chargé de prêcher aux paysans la révolte contre la propriété, donne lieu à une descente de police. Youggout et Iqbal sont emmenés au chef-lieu où un magistrat corrompu, substitut du gouverneur du district, siège dans une maison de plaisir, fuyant les responsabilités et se donnant du bon temps, en compagnie de prostituées.
Deux trains de cadavres ont déjà stoppé à Mano Majra. Le chargement du premier a été incinéré sur place, après réquisition du bois et du pétrole appartenant aux habitants. Celui du second est enfoui dans une fosse ouverte par un bulldozer. Un troisième train est annoncé. Il porte les musulmans évacués de Mano Majra par ordre ; la jeune Nooro se trouve à bord. Une bande de fanatiques sanguinaires prépare le hold-up que fait échouer Youggout, au prix de sa vie.
Cette âpre fresque nous transporte dans l'un des points du monde où, depuis la deuxième guerre mondiale, les conflits religieux ont pris la forme la plus violente, la plus implacable. L'auteur ne nous cache aucun aspect d'une réalité tragique qu'il anime par la puissance de son art.