Le Lycée Carnot

Gallimard
Parution
«J'habite toujours le quartier de Carnot, et je passe souvent devant la porte du lycée. D'habitude, je ne trouve pas l'aspect du lieu conforme à celui qu'il avait pour moi naguère. Mes impressions premières ne se reproduisent pas. (Pas plus que lorsque je reprends, en sens inverse, une route que je viens de faire pour la première fois). Toutefois, dernièrement, et d'une façon vraiment surprenante, le passé a, de nouveau, vécu pour moi un dimanche après-midi. Il n'y avait personne dans les classes ni dans les cours. Le tennis même chômait. Alors j'ai cru sentir, dans le hall silencieux, l'âme des jeunes du passé. Je pensais fortement et avec plaisir à ma présence dans ce lycée. Je n'éprouvais aucune gêne. J'avais envie que le plaisir dure. À ce moment, j'ai décidé d'écrire quelque chose sur Carnot. Il m'a semblé qu'un essai sur le lieu où nous avons fait nos études ne serait pas forcément d'une lecture mélancolique. Puis, cette entreprise m'a intimidé. Carnot m'est apparu comme l'"intimidation passée et présente". Je craignais de ne pouvoir communiquer mon contentement à aucun camarade, jeune ou vieux. Je n'ai été rassuré qu'en prenant conscience de n'avoir pas écrit un livre larmoyant. J'aurais voulu qu'il fût plein de gaîté lucide. (Je ne suis pas du tout persuadé d'y être parvenu.) Évidemment, mon texte n'est pas émouvant pour ceux qui pensent que l'émotion doit être larmoyante. Il le sera peut-être pour ceux qui aiment la sincérité. Ce n'est pas une histoire sévère et scolaire du lycée à travers les âges. C'est un recueil de petits souvenirs, d'anecdotes, de portraits et d'analyses. (Et d'aperçus sur l'époque actuelle).
En deux cents pages de notes sur l'amitié, le quartier, le lycée pendant la guerre, le sport, les élèves et les professeurs, vous retrouverez bien des camarades, et l'atmosphère d'un coin de Paris où vous avez plus ou moins vécu.»
Maurice Courtois-Suffit.