La vie d'Ingres
Collection Vies des Hommes illustres (no62)
Gallimard
Parution
Si l’on songe aux écarts de son caractère, à la ligne plusieurs fois brisée de sa carrière, M. Ingres a droit à la consécration d’une mode actuelle ; c’est un grand artiste indépendant. Mais si l’on voit l’œuvre peinte et la doctrine écrite, il faut trouver ses limites au grand homme ailleurs que dans un mot aussi vaste et aussi large. M. Ingres était si au-dessus de l’indépendance qu’il accepta les plus grands honneurs. Il devint le chef écouté et assez peu compris d’une partie de l’École française.
M. Ingres a été enrobé par le destin dans un siècle qui n’était pas le sien, et dans une société bourgeoise dont il partagea toutes les vues, hormis sur l’Art. Que voulait-il?
Il voulait retrouver une tradition classique, encrassée par de multiples contre-sens, cette tradition n’apparaissant plus qu’à travers le prisme d’un académisme sans vertèbre.
Dans un long séjour en Italie, M. Ingres qui était un méridional de tempérament devint un Latin, avec toute la richesse de culture que suppose le mot, et toute la forte grâce que les dieux lui ont accordée. En plein dans la tourmente romantique, un homme du XIXᵉ siècle est venu s’abreuver et se purifier auprès des Anciens. D’autres l’ont fait aussi, dira-t-on, à la même époque. Oui, mais pas avec la même clairvoyance, la même sensibilité, la même foi, il s’en faut!
Pourtant M. Ingres n’est pas un héros… il s’en faut aussi… On lui trouvera une nature complexe, à la fois bien faible et haute.
En tous cas, en I930, M. Ingres a le droit de parler, car ce qu’il croyait quelques-uns le veulent encore.
Résumons-le en laissant à ce livre le soin de l’éclairer : point de liberté sans discipline.