Jorge Amado (1912-2001)
Écrivain et militant communiste né en 1912, Jorge Amado est l'auteur de nombreux romans – parmi lesquels Bahia de tous les saints et Capitaines des sables –, qui ont fait de lui l'ambassadeur de la littérature brésilienne. Son œuvre a été traduite dans une cinquantaine de langues.
Jorge Amado est né en 1912 à Ferradas, dans une plantation de cacao du sud de l'État de Bahia. Toute son enfance est marquée par la rudesse de cette « terre violente » que les planteurs se disputent arme au poing. C'est à Bahia qu'il commence ses études. Il s'enfuit à treize ans d'une école religieuse pour courir la campagne. À quinze ans, il travaille dans un journal. Puis il part pour Rio de Janeiro où il publie, en 1931, alors qu'il n'a que dix-neuf ans, son premier roman Le Pays du Carnaval et, un an après, Cacao, qui le classe parmi les écrivains les plus populaires du Brésil.
Il travaille alors avec le grand éditeur José Olympio, fait du journalisme, voyage dans toute l'Amérique latine, publie ouvrage sur ouvrage et s'engage politiquement de plus en plus. En 1936, à la veille de la dictature de l'Estado Novo, et alors qu'il est devenu docteur en droit, il est emprisonné et ses livres sont interdits. L'année suivante, après Mar morto qui lui avait valu le prix Graça Aranha (le Goncourt brésilien), il ferme le cycle de ses romans de Bahia avec Capitaines des sables. En 1941, il est contraint de s'exiler en Argentine, mais il peut regagner le Brésil quand son pays se range aux côtés des Alliés contre l'Axe. Il y reprend son activité politique et littéraire.
En 1945, membre du parti communiste, il est élu député national à São Paulo. C'est de cette époque qu'il écrit Les Chemins de la faim. En 1948, au moment de l'interdiction du parti communiste, il doit de nouveau s'exiler. Durant cinq ans, il visite Paris – où il se lie d'amitié avec Picasso, Aragon, etc. – puis la Tchécoslovaquie et l'U.R.S.S. Il écrit Les Souterrains de la liberté, rentre au Brésil en 1953, voyage sans arrêt pendant trois ans puis, dès 1956, consacre tout son temps à la littérature. Jusqu'en 1984, Jorge Amado publiera ainsi encore une dizaine de romans, dont la plupart ont été adaptés pour la télévision brésilienne ou portés à l'écran. Très populaire au Brésil où elle atteint des tirages considérables, son œuvre est en outre traduite dans le monde entier. En France, Jorge Amado a été nommé commandeur de la Légion d'honneur par le président Mitterrand en 1984 et, en 1990, a obtenu le prix Cino Del Duca pour l'ensemble de son œuvre. L'auteur brésilien s'est éteint le lundi 6 août 2001, à Salvador de Bahia, à l'âge de 88 ans.
Pour l'édification d'un monde en forme de roman, par Jorge Amado
« Quand j'étais jeune, je travaillais la nuit, je passais toute la nuit à écrire. J'écrivais vite. La conception même du roman n'a pas varié : c'est un processus d'élaboration qui se déroule dans ma tête, durant très longtemps. Des idées prennent vie, je les vois, je sais ce que je veux raconter, c'est-à-dire les idées que je veux faire passer. Peu à peu je vois ces idées se transformer en actions, en personnages, en ambiances. C'est encore comme ça aujourd'hui. La différence, c'est que lorsque j'étais jeune il m'arrivait, compte tenu de la faiblesse relative du rendement, de faire des partages. Il m'arrivait que des idées servent à plus d'un livre. Par exemple, l'idée qui m'a conduit à écrire Bahia de tous les saints m'a fourni deux autres livres, Mar morto et Capitaines des sables, qui étaient déjà là et qui se sont développés indépendamment. Je n'ai pas été capable de constituer toutes mes idées en un livre unique, je ne pouvais pas trouver l'ordre romanesque qui convenait, ordonner la construction de manière à tout faire entrer dans l'action d'un seul livre.
Ça continue à être ainsi aujourd'hui, je dois penser les choses.
Il n'y a que le rythme du travail qui change. Quand j'étais jeune, je pouvais écrire huit, dix pages... Il n'y a que dans la jeunesse que l'on a ce manque de recul, on pense que l'on est un grand écrivain, que tout ce que l'on écrit est admirable, etc. Puis l'esprit critique se développe, l'autocritique. Aujourd'hui mon travail me coûte plus d'efforts qu'autrefois parce que je suis beaucoup plus clairvoyant sur mes limites, et d'autre part parce que l'on doit toujours travailler plus en profondeur. »
Jorge Amado, Conversations avec Alice Raillard, Gallimard, 1990, p.279-280.
Dans La NRF
- Roger Breuil, « Bahia de tous les saints, par Jorge Amado », La NRF n° 310, juillet 1939
- Robert Abirached, « Cacao, par Jorge Amado », La NNRF n° 40, avril 1956
- Jean Duvignaud, « Tereza Batista, par Jorge Amado », La NRF n° 263, novembre 1974