Moralités littéraires

Collection Blanche
Gallimard
Parution
«Il s'agit ici d'observer les auteurs du même œil dont ils voient les hommes. On prétend étudier l'imagination dans cette image des autres qui est la sienne. On suppose même que ceux-là seuls deviennent transparents qui croient, dans leur miroir, montrer l'étranger. Pendant que Flaubert explique Mme Bovary, le rideau qui nous cachait Flaubert se découd. Nous ne connaissons bien que les gens qui se piquent de parler d'autrui. C'est par ce biais que la critique littéraire est l'affaire du moraliste. Alors le chasseur, à son insu changé en gibier, est le plus vulnérable des assassins car les romans ont une façon de mentir qui empêche de mentir l'impudent qui les fait. Le noir de l'encre n'est que l'illusion de la seiche.
Mais ce trou par où un indiscret regarde un indiscret punit tour à tour les perceurs de murs. La critique aussi, plus elle est pénétrante, mieux elle éclaire la main qui tient la lampe. Personne n'écrit impunément.»
Roger Judrin.
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