La sagesse de Shakespeare et de Goethe

À côté de la sagesse traditionnelle de la Grèce et de celle de l'Asie, l'Europe moderne a su créer des formes nouvelles de la sagesse, qui se rattachent par certains traits à cet idéal antique et toujours jeune, mais qui possèdent aussi leur caractère propre. C'est chez des écrivains, c'est notamment dans l'œuvre d'un Shakespeare et d'un Goethe que ces formes de la vie spirituelle ont trouvé leur expression la plus complète. Une poésie féerique et tragique chez le premier, la poésie et la science unies chez le second deviennent l'instrument d'une sagesse plus riche et plus variée que celle de la Grèce et de l'Asie, plus proche de nos sentiments et de nos besoins. On s'est efforcé dans cet ouvrage de la dégager. Ce n'est ni une simple biographie ni une étude purement littéraire des deux artistes. C'est une tentative pour mettre en lumière le progrès intime, l'ascension spirituelle qui donne une signification supérieure au développement de leur vie comme à la suite de leurs écrits, en absorbant dans une sagesse renouvelée le rêve poétique et pastoral de la Renaissance franco-italienne chez Shakespeare, l'élan romantique et le classicisme bourgeois chez Goethe. Pour faire ressortir la valeur générale et durable de cette sagesse, ainsi que sa liaison avec les problèmes moraux qui s'imposent à l'Europe moderne, on a donné comme fond de tableau à ces deux portraits spirituels une large esquisse de la civilisation européenne des derniers siècles, dont les lignes viennent converger dans les deux figures principales.