La Dévotion à la croix

. Pièce en trois journées
Adapt. de l'espagnol par Albert Camus
Gallimard
Parution
«La Dévotion à la Croix, plusieurs fois traduite, n'attendait pas cette nouvelle version pour être révélée au lecteur français. Mais Marcel Herrand, séduit par cet extravagant chef-d'œuvre, a choisi d'en donner trois représentations cette année à i'occasion du Festival d'art dramatique qu'il organise dans la cour du château d'Angers. Il souhaitait pour cela un texte qui, tout en s'efforçant de rester fidèle à la lettre et au ton de l'original, pût cependant être parlé et déclamé commodement. Écrite sur sa demande, la présente version, sans pouvoir répondre vraiment à cette exigence idéale, s'y est efforcée. Elle n'est pas une adaptation et elle a recueilli tout le dialogue de Calderon. Mais elle vise surtout à fournir un texte de représentation, écrit pour des acteurs. Autrement dit, elle cherche à faire revivre un spectacle, à retrouver le mouvement de ce qui fut d'abord une pièce jouée devant des auditoires populaires, une sorte de mélodrame religieux enfin, à mi-chemin des mystères (ce qu'on appelait en Espagne les "autos sacramentales", genre où Calderon régna en maître incontesté) et du drame romantique... On y a été aidé par les audaces de pensée et d'expression du plus grand génie dramatique que l'Espagne ait produit. La grâce qui transfigure le pire des criminels, le salut suscité par l'excès même du mal sont pour nous, croyants ou incroyants, des thèmes familiers. Mais c'est plus de trois siècles avant Bernanos que Calderon prononça, et illustra de façon provocante, dans la Dévotion, le "tout est grâce" qui tente de répondre, dans la conscience moderne, au "rien n'est juste" des incroyants. À cette occasion, on s'estimerait satisfait si cette version nouvelle pouvait avoir mis l'accent sur la jeunesse et l'actualité du théâtre classique espagnol.»
Albert Camus.