Le nouveau recueil de Jean Tardieu révèle un aspect inattendu de ce poète. Il nous entraîne dans une région – hantée par Jarry, Prévert, Queneau, – où le lyrisme se dissimule (mais ne disparaît point) sous l'agencement cocasse des mots. Ce que l'auteur nous propose
aujourd'hui, dans les termes légers du chantonnement et de la moquerie, ne diffère pas du contenu essentiel de ses précédents recueils, plus graves ou plus tendus : on y trouve toujours la vision d'un monde partagé entre présence et absence, entre la volonté d'être et la menace de la disparition. C'est sur cette note que s'ouvre le volume, avec la brève histoire de Monsieur Monsieur, personnage double, qui se nie en «se réfléchissant».
Quant à leur forme, ces pièces, situées «au carrefour du burlesque et du lyrisme», exigent d'être lues à haute voix pour faire tout leur effet à la manière de pantomimes.
Groupés sous les titres successifs de Monsieur Monsieur, Colloques et interpellations, Metaphysical Poetry, Objets perdus, Études pour la voix seule, Chansons avec ou sans musique, ces poèmes sont en quelque sorte, un renouvellement de la chanson ou du monologue. Ils amusent et émeuvent, en laissant ouverte la porte du rêve.