Cette Histoire de la République Fédérale Allemande apparaît en vérité comme un chapitre de l'histoire de l'Europe depuis la fin de la guerre. C'est sous cet angle que l'auteur a voulu la lire et l'écrire. En effet, la volonté de l'emporter sur l'Allemagne fut le moteur du dernier conflit mondial et la défaite de celle-ci, une fois obtenue, fut le seul ciment entre ses vainqueurs. Cependant la politique comme la nature a horreur du vide. Et c'est pourquoi, malgré la destruction de toute autorité politique en Allemagne, il demeurait en 1945 cette «entité politique unique allemande» que les vainqueurs s'engageaient entre eux à considérer globalement et «dans ses frontières de 1937». C'est là une phrase trop souvent oubliée, et cependant capitale.
Car dès lors c'est bien en ce cœur du continent qu'allaient d'une part se jouer le destin politique de l'Europe en même temps que les relations entre les anciens Alliés devenus désormais rivaux. Et, d'autre part, c'est en Allemagne que devait s'affirmer dans toute sa clarté l'opposition entre les deux idéologies qui se partageaient le monde. La doctrine selon laquelle seul le gouvernement allemand fondé sur de libres élections démocratiques est en droit de représenter «toute l'Allemagne dans ses frontières de 1937» est comme le fondement moral imprescriptible de la Constitution de la République Fédérale depuis sa création. Doctrine à laquelle ont répondu fils de fer barbelés, no man's land miné sur des kilomètres de largeur, miradors, puis mur de Berlin, tout au long de la frontière de la zone soviétique d'occupation.
C'est bien aussi, en dix chapitres courts et clairs, une histoire de l'Europe, donc une histoire de la liberté, que l'on découvre en ce très utile ouvrage. Car c'est d'abord en Allemagne que la liberté de l'Europe s'affirmera ou sombrera.