En 1952 la Guadeloupe semble une île heureuse : s'il se pose des problèmes économiques, chacun ferme les yeux. Mais personne n'a oublié qu'en 1802 le colonel Delgrès, vaincu par les armées de Bonaparte, aurait caché à Pâline, dit-on, quarante barils d'or. Pâline est une ancienne «habitation», usine et champs de canne à sucre, où Constant Sougès a préservé un climat exceptionnel. Pâline, c'est la douceur de vivre. L'Eden.
Et puis, un jour, un vol, des meurtres... En fait la violence latente à Pâline était en germe dans le désir des uns et des autres d'être «autre chose», de dépasser la situation reçue en naissant. Constant Sougès, par exemple : ce descendant de flibustiers, possesseur d'esclaves, vit en maître sur un domaine qu'il a vendu et entend personnifier les apirations à la liberté d'une terre qui n'est plus la sienne. Philippe Bonnier, héritier de la puissante firme parisienne qui a acheté Pâline, se voudrait modestement un homme parmi les autres. Il se laisse séduire par celle-ci et celle-là et provoque la fureur de Constant. Quant à Jab-Herma, en apparence un simple chauffeur, il est considéré dans le pays comme un sorcier redoutable. Mais ce n'est encore là qu'une apparence : il joue ce jeu du sorcier que le milieu et les circonstances lui imposent, et il attend son heure.
Elle va bientôt sonner... Pâline est encerclée par un torrent en crue qui bientôt emprisonne tout le monde. Ce qui reste alors en jeu, ce ne sont pas seulement les barils d'or, c'est la vie de chacun et de tous.
Ce nouveau roman de Michèle Lacrosil, où l'on entend souvent un écho de Conrad, révèle certains aspects du malaise antillais et voudrait ouvrir une voie.