«Nous voyageons au cœur de l'énorme et de l'immense. Le grand bleu de la mer et le grand bleu du ciel. Le grand ocre brun de l'Amazone. Le grand vert de la forêt. Les voiles qui mangent le vent...
Un vent fort nous souffle au visage. Il est 2 h 45, ciel sans lune, le pont est noir, et nous allons bientôt quitter l'Amazone, pour retrouver l'Atlantique. Deux grillons ont embarqué avec nous, et leurs stridulations courent par tout le navire comme si la forêt avait voulu nous accompagner en mer. La nuit offre des instants privilégiés. Dans l'écume que soulève le navire, on entrevoit des caravanes scintillantes, comme si les étoiles s'étaient décrochées du ciel pour nous cligner de l'œil tout près, là, dans les flots. On dirait des lucioles ou des vers luisants. Accompagner le mythique Belem pour une traversée de l'Atlantique, c'est prendre le temps, enfin, de ne contempler que le mouvement changeant des nuages, la mer qui se creuse et se dresse, le temps qui passe avec le soleil et le vent.»