«Rouget perçut un craquement derrière lui, il tourna la tête mais ne vit rien. Rassuré, il se concentra à nouveau, le regard tendu sur la houppette blanche d'un arrière-train.
Il porta lentement son fusil à l'épaule, cala bien la crosse, puis visa, le doigt sur la détente... Rouget perçut encore des craquements dans son dos. Il lui sembla que le bois mort criait... Il se retourna...
Javelle était à cinq pas, un pied en suspens au ras des bruyères... Rouget se détendit et s'élança... Son pied droit glissa sur des écorces pourries... Une poigne s'abattit sur son épaule et la serra.
- Au nom de la loi ! »
Ainsi va commencer l'épopée authentique de Louis Rouget, journalier agricole analphabète, qui, un jour, en tuant un lapin pour nourrir sa famille, allait provoquer sans jamais le savoir des événements qui firent trembler le second Empire.
En 1862, Victor Hugo publia Les Misérables. Un homme simple y dérobe un pain, il est condamné au bagne, s'évade, mais un policier inflexible le poursuit. Le héros participe à un soulèvement populaire. Le policier traque sans fin l'insurgé.
Le Javert de Victor Hugo s'appelait Javelle, et Rouget le braconnier sera sa victime jusqu'au fond des cachots.