Peut-être pourrait-on dire que le roman policier, qui est une forme moderne de l'amusement psychologique, est sur la pente du déclin, puisqu'il a touché au sommet de la mode. Mais un genre est toujours renouvelable. François Poncetton, quittant les sujets d'analyse pure, de critique et d'études romancées et scientifiques où il se plaisait, s'est donné le souci d'imaginer une action bâtie autour d'une suite de
beaux crimes. On devine qu'il a apporté dans cette entreprise l'ambition d'offrir une manière nouvelle de divertissement.
Il y a deux façons d'interpréter une aventure policière : l'américaine et la française. Le sou d'or est un roman construit à la française.
Sans dédaigner les conditions mathématiques et géométriques qui forment les données d'un problème criminel, l'auteur a voulu créer l'atmosphère d'un fait-divers scandaleux dans une petite ville de l'Île-de-France, et il a étudié les rebondissements d'un scénario qui d'abord satisfait, au plus épais des complications, les exigences de la crédibilité.
Il s'est ensuite attaché à animer des personnages qui s'imposent à la mémoire et illustrent la suite de drames affreux au titre de témoins, de juges, d'acteurs ou d'indifférents. Les aventures de Gilbert Irigaru, mêlé par scrupule d'amitié et d'amour à une instruction assez fabuleuse, celles de M. Joachim Dambar, juge libéral, celles de Mlle Hilda Tobler si blonde, vamp charmante, celles, centrales, de M. Theophraste Levert, clerc d'huissier à la manière d' «Olivode», et celles
enfin de tant d'autres, y compris M. Arsène Vorimbeau, victime d'un vol incroyable dont les conséquences mettent en alerte un calme chef-lieu de canton, la province et Paris aussi, forment une sorte de ronde infernale à la fois tragique et comique.
Car François Poncetton, estimant enfin qu'une distraction intellectuelle doit emprunter toutes les couleurs, s'est abandonné à une fantaisie qui teinte tous les
personnages du Sou d'or d'une agréable ironie, les rend plus familiers, et leur donne ce caractère humain de l'incohérence, qui est l'authentique marque de l'humble réalité.