Le Récit de Fatalla Sayeghir révélé en 1835 par Alphonse de Lamartine dans son Voyage en Orient est, ou devrait être, dans toutes les mémoires. Ce petit chef-d'œuvre quasi classique conte les aventures extraordinaires et les exploits merveilleux du chevalier Lascaris, descendant des Empereurs de Byzance, agent secret de Napoléon 1er, son «colonel Lawrence», – comme disait l'un quelconque des spécialistes des «grands récits historiques», – chargé par Sa Majesté de sillonner la route des Indes et de soulever chemin faisant les Arabes du «Grand désert» contre les Anglais. Cet épisode en marge de l'«épopée» impériale, n'est qu'un petit roman napoléonien et exotique, traduit de l'arabe par M. et Mme de Lamartine qui, mystifiés par Fatalla Sayeghir, ce menteur fieffé et faussaire imprudent, mystifieront à leur tour des milliers et des milliers de lecteurs, y compris des bonhommes censés savants, tels que les professeurs d'histoire (ou d'histoires) arabes. Le chevalier Théodore Lascaris fut un homme de génie qui rata sa destinée par la faute de Napoléon. Si ce Corse avait écouté ce Grec, il eut été plus et mieux, que César : Alexandre, et il eût conservé à la France, malgré les Turcs, et en dépit des Anglais, l'Égypte, d'où elle eût étendu sa domination sur l'Afrique et l'Asie. La face du monde aurait pu se trouver
changée à son profit, avant... Waterloo. Ce petit essai met, pour la première fois, après un siècle, grâce à des documents puisés aux archives du Foreign Office et à celles du Quai d'Orsay, les choses au point et les gens à leur place. Il montre aussi comment se fabriquent les héros – de la même manière à peu près que les saints. C'est presque, on en conviendra, un ouvrage édifiant, en son genre, bien qu'il se propose de démolir une des légendes dorées qui encombrent l'histoire.