«Le spectacle, s'écrie Hamlet, c'est le piège où je prendrai la conscience du roi». Ce livre de Jean Duvignaud est constitué de cinq récits qui portent précisément sur le thème du spectacle et qui forment une véritable confrontation du spectacle et de la vie.
Dans Le Piège, premier récit du recueil, on voit un metteur en scène tourner un film dans la lagune de Venise. Le sujet en est la mort d'un professeur fasciste abattu secrètement pendant la guerre. Le metteur en scène qui a assisté à l'événement dont il est le seul survivant a menti : son film ne peut corriger la vérité. Il meurt.
Un mort pour un autre raconte une substitution de cadavres et met en scène un sous-préfet délirant faisant un discours devant des cercueils vides.
Le Prince Toto est l'histoire d'un mendigot mythomane qui se vante d'avoir commis un crime : la police le traque et le tue pour ce crime imaginaire.
L'Évêque meurt, c'est le choc qu'éprouve un enfant devant le lit de mort d'un évêque. Il se regarde dans une glace : quand il détourne les
yeux, il a quarante ans ; bientôt il sera criminel.
L'Apatride raconte sa vie pour se donner des raisons de se suicider. Son récit terminé, un personnage imaginaire s'est tué à sa place, et lui ne peut plus mourir.
Ces cinq récits violents, heurtés, saccadés, dramatiques, qui font parfois songer à Faulkner apportent cinq fois la preuve de ceci, qu'un homme est plus vrai dans l'imaginaire que dans la conscience des autres, sur une scène que dans la réalité. Mais la scène est un piège dont la rançon est la mort.