Mrs. Miniver adressa un petit signe de tête à la marchande de fleurs et, tenant sa gerbe de chrysanthèmes comme une corne d'abondance, avec une sorte de joie cérémonieuse, elle descendit la rue. «Quel délice, songea-t-elle, de se réinstaller chez soi, de ranger l'été dans sa boîte, de reprendre le cours, interrompu, de sa vie quotidienne.» Certes, elle appréciait les vacances, mais toujours se sentait soulagée, lorsqu'elles étaient passées... C'était exquis, de se sentir ainsi suspendu entre l'été et l'hiver, de savourer, en même temps, ce que l'un et l'autre a de meilleur...
En 1938 et 1939, tous les quinze jours, les Anglais se précipitaient sur le Times pour dévorer un nouveau chapitre racontant l'histoire de la famille Miniver. Ils se retrouvaient dans ces délicieuses vignettes de la vie quotidienne : le retour des vacances, les préparatifs de Noël, l'arrivée du printemps, une partie de chasse et puis, peu à peu, la menace de la guerre.
Réunis en volume en octobre 1939, ces textes devinrent un énorme best-seller. Jan Struther, l'auteur, avait été évacuée aux États-Unis avec ses enfants et les Américains tombèrent amoureux de Mrs. Miniver, au point que Roosevelt déclara que ce livre avait hâté leur entrée en guerre : il fallait voler au secours de toutes les familles Miniver d'Angleterre...
Aujourd'hui restent le charme désuet, la grâce surannée de ces courts chapitres et l'amour de la beauté dans les plus simples détails de la vie.