Robert Mallet a attendu que la mort ambiguë de Gide fût suivie de la mort limpide de Claudel pour rapporter les conversations qu’il eut avec les deux grands écrivains. Préparant la publication de leur Correspondance en 1949-1950, alors que plus rien ne pouvait les rapprocher, il leur servit de trait d’union. Son livre est donc d’abord une confrontation «par personne interposée» de deux hommes irrémédiablement brouillés et pourtant obligés de se concerter.
Une mort ambiguë est en outre une «méditation vécue» à partir de la leçon gidienne qui, dans son ambiguïté, est le symbole même de la vie, comme de la mort. Robert Mallet, en face du oui de Claudel et du non de Léautaud – que les circonstances lui permirent de bien connaître également – précise la valeur du peut-être de Gide. On voit apparaître dans son livre d’autres écrivains contemporains dont il discute les agissements ou les opinions, mêlant les développements d’un moraliste aux souvenirs très animés d’un auteur de Journal. Robert Mallet pose le problème de l’inquiétude individuelle et sociale, et, fort de l’expérience des «Grands Aînés », mais s’en séparant pour mieux s’en servir, il propose à la jeune génération une conception nouvelle de la Cité intérieure qui pourrait être une solution.