Un grand personnage
Collection La Renaissance de la Nouvelle
Gallimard
Parution
«La première de ces nouvelles, et la plus importante, décrit un personnage, plutôt qu’elle ne raconte une histoire. Un grand personnage. Le
monde comme il va – provisoirement – nous oblige à tenir compte d’une certaine sorte de grands personnages.
On considère souvent que la vanité est un travers assez supportable, parce que très répandu. Mais chacun établit pour soi-même une hiérarchie des vertus et des vices, et je tiens la vanité pour un des vices les plus laids, les plus méprisables et les plus dangereux. Le Président Roncier-Percery, qui vit d’honneurs et de flatterie, et qui meurt quand il est enfin obligé de se connaître pour ce qu’il est, je l’ai peint sans indulgence ; il faudrait savoir si je puis ajouter : «sans indulgence mais sans haine».
On m’a déjà dit que le narrateur, dans ce récit, laisse paraître, lui aussi, quelques sentiments bas; on lui a reproché de jouer un peu trop bien sa partie dans ce concert des lâchetés qui permet, justement, aux incapables de jouer le rôle des maîtres. C’est vrai sans doute. Le nombre des personnes méprisables est assez grand pour qu’on en rencontre deux quand on croyait n’en chercher qu’une. Tant pis pour toutes. Le mépris est un sentiment tonique, et trop délaissé de nos jours.
La haine, aussi, est un bon sentiment, bien riche, bien rigoureux et bien valable. Je parle d’une haine sans mépris, et même sans méchanceté. C’est ce que le héros d’une autre nouvelle : Crime passionnel, renonce à expliquer à des hommes qui ne savent que juger et non comprendre. Je dirais presque que la clef de ce récit est dans une question de vocabulaire ; c’est pourquoi il pose peut-être une question importante pour l’étude, ou le recensement des passions. Il n’est pas possible de surmonter les passions, mais il est utile de les connaître.
On trouvera dans ce volume quatre autres nouvelles, qui sont plus courtes et, je l’aurais voulu, plus amusantes. Car il n’est pas sage de penser toujours au mépris ou à la haine.»
Pierre Bost.
On considère souvent que la vanité est un travers assez supportable, parce que très répandu. Mais chacun établit pour soi-même une hiérarchie des vertus et des vices, et je tiens la vanité pour un des vices les plus laids, les plus méprisables et les plus dangereux. Le Président Roncier-Percery, qui vit d’honneurs et de flatterie, et qui meurt quand il est enfin obligé de se connaître pour ce qu’il est, je l’ai peint sans indulgence ; il faudrait savoir si je puis ajouter : «sans indulgence mais sans haine».
On m’a déjà dit que le narrateur, dans ce récit, laisse paraître, lui aussi, quelques sentiments bas; on lui a reproché de jouer un peu trop bien sa partie dans ce concert des lâchetés qui permet, justement, aux incapables de jouer le rôle des maîtres. C’est vrai sans doute. Le nombre des personnes méprisables est assez grand pour qu’on en rencontre deux quand on croyait n’en chercher qu’une. Tant pis pour toutes. Le mépris est un sentiment tonique, et trop délaissé de nos jours.
La haine, aussi, est un bon sentiment, bien riche, bien rigoureux et bien valable. Je parle d’une haine sans mépris, et même sans méchanceté. C’est ce que le héros d’une autre nouvelle : Crime passionnel, renonce à expliquer à des hommes qui ne savent que juger et non comprendre. Je dirais presque que la clef de ce récit est dans une question de vocabulaire ; c’est pourquoi il pose peut-être une question importante pour l’étude, ou le recensement des passions. Il n’est pas possible de surmonter les passions, mais il est utile de les connaître.
On trouvera dans ce volume quatre autres nouvelles, qui sont plus courtes et, je l’aurais voulu, plus amusantes. Car il n’est pas sage de penser toujours au mépris ou à la haine.»
Pierre Bost.