Sécheresse

Trad. du portugais (Brésil) par Marie-Claude Roussel
Collection La Croix du Sud
Gallimard
Parution
Une immense portion du Brésil intérieur est un désert que l'on nomme le sertao recouvert par la catinga, savane où paissent des troupeaux chétifs. Périodiquement, la sécheresse chasse quelque famille à demi morte de misère : le lit pierreux des rivières sert de piste à leur exode.
Fabiano le vacher, sa femme «mâme Vitoria», ses deux fils et le chien Baleine atteignent ainsi une ferme provisoirement abandonnée par son propriétaire. Ils la remettent en état et y retrouvent, au cœur de l'hiver qui est la saison des pluies, une relative tranquillité. Cependant la paix engendre les rêves ; Fabiano aspire à communiquer avec les hommes grâce aux mots qu'il ne connaît pas : il ne sait ni lire, ni écrire, ni même parler. L'ambition suprême de «mâme Vitoria» est de remplacer leur lit de rondins par un vrai lit tendu de cuir ; le benjamin voudrait ressembler à son père qui sait dompter les chevaux sauvages, tandis que l'aîné essaie de se représenter l'enfer.
Mais une irrémédiable fatalité pèse sur la famille : la misère et l'ignorance les séparent du monde. Si Fabiano se rend au marché du bourg pour y faire des achats, il se fait voler, battre et jeter en prison. La foi, l'amour, la joie, l'espoir sont autant de notions frappées d'interdit.
Et comme pour confirmer l'acuité de leur instinct, obscur et presque animal, des milliers d'oiseaux migrateurs s'abattent un jour sur la région pour lui voler ses dernières réserves d'eau : ils annoncent une nouvelle période de sécheresse. Fabiano et les siens, soumis au sort, quittent la ferme où ils ont connu une apparence de bonheur. Et, nostalgiques, ils partent à la recherche de l'inaccessible pays clément qui, peut-être, se cache derrière les montagnes.
L'auteur a su donner à cette œuvre d'une extraordinaire cruauté une forme sèche et tendue du plus bouleversant effet.