Poésies d'Alvaro de Campos
Trad. du portugais par Armand Guibert. Préface d'Armand Guibert
Édition bilingue
Gallimard
Parution
Le 8 mars 1914, Fernando Pessoa eut la révélation de son pouvoir extraordinaire : debout devant une commode haute, il écrivit d’affilée, dans un état de transe sans analogue dans l’histoire de toutes les littératures, une quarantaine de poèmes, dont un seul fut signé de son nom d’état civil. Il attribua les autres à des personnages fictifs, qu’il devait appeler ses «hétéronymes» et qui étaient des prête-noms dotés d’une biographie, d’une sensibilité et d’un style différents du sien. L’un d’eux était Alvaro de Campos.
Né en 1890, selon sa biographie fictive, ce Méridional a préparé à Glasgow son brevet d’ingénieur mécanicien de la marine. Contemporain de Cendrars, de Larbaud et de Freud, il sacrifie aux idoles du siècle : la machine, le voyage, la sensation brute et la psychanalyse. Écartelé entre des sincérités simultanées, conscient de son rôle d›«investigateur solennel de choses futiles» , Alvaro de Campos se replie sur le sentiment désespéré de son impuissance à expliquer l’énigme de la vie. Si Pessoa lui marque une dilection particulière, c’est qu’ils avaient en commun la passion de la lucidité.