Les secondes noces

Collection Blanche
Gallimard
Parution
«Debû-Bridel, observe Philippe Amiguet, empoigne la vie à pleines mains. Il y a dans son œuvre un dynamisme indéniable.»
C'est pour cela sans doute que Frère Esclave et Jeunes ménages suscitèrent tout de suite tant de sympathie agissante et chaleureuse mais aussi une opposition, parfois fort vive. Banalités, blasphèmes, rêveries morbides, a-t-on écrit de ces livres dont Henri de Régnier, Henry Bidoux, P. Audiat ont signalé, entre autres, «la musique rare et pure», «le chant d'alouette», «la poésie simple comme une églantine», «le sortilège» de ce que J. Ernest Charles appela le triomphe du «réalisme sensible».
On retrouvera ce «réalisme sensible» dans Les secondes noces, roman qui marquera une étape importante dans l'œuvre de Jacques Debû-Bridel dont il révèle un aspect nouveau ; plus dense, plus âpre.
L'axe central de ce récit est une dramatique rivalité de famille provoquée par le heurt des égoïsmes. L'action se déroule à Paris, dans un milieu universitaire.
La passion violente qui domine le professeur Chezeau comme sa seconde femme, la charmante et savante Lucienne, le lent cheminement des sentiments inavouables dans le cœur trouble et exigeant de Madeleine avide de dominer les siens sous le couvert du culte de sa mère défunte, les incertitudes de Raoul aussi prompt à se dévouer qu'à oublier, l'opposition sourde de ces âmes frénétiques et inassouvies nous mène insensiblement au dénouement tragique et brutal.
il y a quelque chose de démoniaque, mais d'un démoniaque tout laïque, dans cette possession des âmes de toute une famille par les forces de destruction : orgueil et égoïsme.
Accessoirement on retrouvera dans Les secondes noces quelques personnages de Jeunes ménages fixés à Paris : Tancrède et Mme Dutilleul. Cette dernière mène la lutte contre la prostitution réglementée, problème que n'hésite pas à aborder, en passant, l'auteur avec réalisme et sincérité, sans complaisance ni littérature.
La poésie de la nature n'est pas absente de ce livre bien que toute l'action s'y déroule en plein XIVᵉ arrondissement à Paris.
Dans ce roman, c'est encore «à pleines mains» que Jacques Debû-Bridel «empoigne la vie».