Le cygne de Proust
Collection L'un et l'autre
Gallimard
Parution
«»On aurait cru qu’il mettait tout, argent, esprit, oui, tout, dans l’art de vivre pour plaire aux dames. Et naturellement il en était payé : elles raffolaient de lui. Mais quelle distinction, quel éclat ! Et quel dandy !…» S’agit-il de Charles Swann dans la Recherche ? Non, de Charles Haas. Mais c’est Proust qui parle.
J’avais sous les yeux la reproduction d’un tableau de James Tissot, Le Balcon du Cercle de la rue Royale. Soudain, je remarquai la place qu’occupait Charles Haas : près de la porte, face aux autres et comme à l’écart, comme s’il hésitait à se mêler aux autres, à pénétrer dans la ronde. Et, tout heureux alors, je me dis : Voilà, c’est ça. Haas fait partie du cercle, mais reste à sa périphérie. Et aussitôt je sus nommer cette marginalité : Haas était juif, sans titre, sans lignée prestigieuse, sans immense fortune. Il cumulait tous ces traits négatifs. C’est de ce jour que ce «cygne» me fut un peu moins distant, moins étrange.»
Henri Raczymow.
J’avais sous les yeux la reproduction d’un tableau de James Tissot, Le Balcon du Cercle de la rue Royale. Soudain, je remarquai la place qu’occupait Charles Haas : près de la porte, face aux autres et comme à l’écart, comme s’il hésitait à se mêler aux autres, à pénétrer dans la ronde. Et, tout heureux alors, je me dis : Voilà, c’est ça. Haas fait partie du cercle, mais reste à sa périphérie. Et aussitôt je sus nommer cette marginalité : Haas était juif, sans titre, sans lignée prestigieuse, sans immense fortune. Il cumulait tous ces traits négatifs. C’est de ce jour que ce «cygne» me fut un peu moins distant, moins étrange.»
Henri Raczymow.