Chaucer
Trad. de l'anglais par Roland Bourdariat
Collection Blanche
Gallimard
Parution
«Il y aurait peut-être trop de candeur à dire que ce livre veut être populaire ; mais du moins veut-il être simple…
Malheureusement, mon dessein de simplifier et mon désir de populariser s’est heurté à deux problèmes, des plus complexes. Dans le second chapitre, je me suis un peu imprudemment lancé dans de grandes dissertations historiques sur l’époque de Chaucer ; et j’ai bien failli me laisser entraîner par le courant très loin de mon sujet… J’ai peur que le lecteur ne s’arrête pour s’étonner, avec une irritation bien compréhensible, que j’aie parfois l’air de parler de la politique moderne plus que de l’histoire du Moyen Âge… Je m’excuse de la disproportion du second chapitre… Peut-être pourrais-je engager le lecteur à ne pas lire ce second chapitre. Au fait, je pourrais l’engager à ne pas lire le livre du tout ; mais il y aurait peut-être là quelque inconséquence…
Enfin, il y aurait quelque affectation de ma part à ne pas reconnaître que je me suis trouvé en présence de problèmes où l’on ne saurait s’attendre que ma parole fît autorité. Mais à relire et à réanalyser ainsi l’œuvre de Chaucer, toute une série de vérités me sont apparues. Chaucer a vécu à la fin du Moyen Âge et de son ordre… je me suis trouvé devant ce fait que Chaucer fut le dernier fruit et l’héritier de cet ordre. Et j’ai aussi compris qu’il était bien plus sain d’esprit, plus joyeux et plus humain que beaucoup de ses successeurs ; qu’il était moins délirant que Shakespeare, moins âpre que Milton, moins fanatique que Bunyan, moins amer que Swift. C’est pourquoi j’ai voulu démontrer dans ce livre qu’il y avait au Moyen Âge une philosophie équilibrée, et que celle qui l’a remplacée l’est infiniment moins.»
Gilbert Keith Chesterton.
Malheureusement, mon dessein de simplifier et mon désir de populariser s’est heurté à deux problèmes, des plus complexes. Dans le second chapitre, je me suis un peu imprudemment lancé dans de grandes dissertations historiques sur l’époque de Chaucer ; et j’ai bien failli me laisser entraîner par le courant très loin de mon sujet… J’ai peur que le lecteur ne s’arrête pour s’étonner, avec une irritation bien compréhensible, que j’aie parfois l’air de parler de la politique moderne plus que de l’histoire du Moyen Âge… Je m’excuse de la disproportion du second chapitre… Peut-être pourrais-je engager le lecteur à ne pas lire ce second chapitre. Au fait, je pourrais l’engager à ne pas lire le livre du tout ; mais il y aurait peut-être là quelque inconséquence…
Enfin, il y aurait quelque affectation de ma part à ne pas reconnaître que je me suis trouvé en présence de problèmes où l’on ne saurait s’attendre que ma parole fît autorité. Mais à relire et à réanalyser ainsi l’œuvre de Chaucer, toute une série de vérités me sont apparues. Chaucer a vécu à la fin du Moyen Âge et de son ordre… je me suis trouvé devant ce fait que Chaucer fut le dernier fruit et l’héritier de cet ordre. Et j’ai aussi compris qu’il était bien plus sain d’esprit, plus joyeux et plus humain que beaucoup de ses successeurs ; qu’il était moins délirant que Shakespeare, moins âpre que Milton, moins fanatique que Bunyan, moins amer que Swift. C’est pourquoi j’ai voulu démontrer dans ce livre qu’il y avait au Moyen Âge une philosophie équilibrée, et que celle qui l’a remplacée l’est infiniment moins.»
Gilbert Keith Chesterton.