C'est l'histoire d'un sadique sanguinaire monstrueux qui, pendant plusieurs années, parcourut la France dans tous les sens, laissant partout des cadavres sur son passage, assassinant, mutilant et violant ensuite ses victimes, jeunes filles, jeunes garçons et vieilles femmes. Émile Fourquet a pu relever à la charge de ce vampire une soixantaine de crimes, tant assassinats que tentatives, commis dans 24 départements, mais on ne connaîtra jamais le nombre exact de ses forfaits.
Après Gilles de Retz ou de Rays, maréchal de France et compagnon de Jeanne d'Arc, exécuté à Nantes en 1440 à l'âge de 36 ans et qui, selon l'accusation, égorgea plus de 200 enfants, Vacher occupe incontestablement la première place parmi les vampires connus. Ni le marquis de Sade (1741-1816) «le théoricien ingénieux et le peintre épouvantablement imaginatif du plaisir sexuel accompagné de la douleur», qui a donné son nom à l'état de perversion de l'instinct génital
que l'on nomme sadisme ; ni Jack l'éventreur, le célèbre vampire anglais qui égorgea, éventra et découpa en morceaux onze femmes du 1^er décembre 1887 au 10 septembre 1889, ni Landru qui tua et incinéra une demi-douzaine de femmes ; ni Peter Kurten, le vampire de Dusseldorf, n'ont égalé par le nombre des forfaits, Vacher, trente ou quarante fois assassin ... Et ce n'est pas sans une vive émotion que le lecteur suivra les poignantes péripéties des erreurs judiciaires abominables dont furent victimes de nombreux innocents accusés des crimes commis par le monstre, emprisonnés d'abord plusieurs mois, puis, après leur mise en liberté, insultés, lapidés et traités en parias par des populations entières dévoyées et furieuses de leur élargissement.
Il ressortira enfin du dernier chapitre, consacré à l'état mental de Vacher, que s'il se rencontre encore, fort heureusement, des médecins aliénistes résolus à ne pas subordonner, (sauf, bien entendu, le cas de démence flagrante), l'intérêt de la société à des doctrines encore incertaines en raison de la subtilité des distinctions
sur lesquelles elles reposent, la science médicale ne pouvant dire où commence et où finit la folie, – il est malheureusement d'autres spécialistes des maladies mentales, et non des moindres, que la déformation professionnelle porte à conclure avec trop de facilité et de sérénité à l'irresponsabilité des criminels les plus dangereux.