Entre 1948 et 1950, Odysseus Elytis vient à Paris. Séjour assorti de voyages, réflexion sur la poétique. Confrontant sa pensée à celle de l'Europe de l'après-guerre, il explore depuis huit ans la spécificité et l'universalité de la Grèce, de sa Grèce. Revenu dans son pays en 1951, il publie la synthèse d'une décade de sa vie sous la forme d'un grand poème de la « grécité» intemporelle, Axion Esti.
Livre conçu comme un monument et une liturgie, Axion Esti dans une architecture savante déploie les facettes d'un pays prestigieux, depuis l'esprit antique jusqu'à l'expérience récente des luttes de la guerre, de l'Occupation, de la guerre
civile. Dans une langue éblouissante qui fusionne le sensuel, le philosophique, le quotidien, avec le sacré, il recueille si bien l'essence temporelle et intemporelle de la Grèce que le livre est aussitôt honoré du premier Prix national de poésie. Sa faveur extraordinaire dans le public est amplifiée par l'oratorio Axion Esti composé par Mikis Theodorakis en 1963-1964.
Rêve, naissance, passion, amour des autres, genèse de la Parole, de la patrie, de la liberté, imprégnée du souffle de la mer, et de la mort, mémoire d'un monde dont l'Occident est l'héritier, perspectives ouvrant sur l'inouï (Elytis est traducteur de Rimbaud et des surréalistes). omniprésence surtout de la lumière grecque dont Elytis rend la sensation parfois quasi tangible : parmi tant de richesses, tels sont quelques-uns des éléments forts qui scandent la magistrale splendeur d'Axion Esti, et donnent à ce livre le rayonnement d'une sorte d'astre poétique incomparable.