Ce nouveau volume de poèmes de Louis Brauquier rassemble Liberté des mers (paru en 1942 à Alger), Le Pilote (paru en 1935 à Tunis), et Écrits à Shanghai, inédit. La mer, la nostalgie des ciels, des ports, des paysages lointains inspirent la plupart de ces poèmes très sensibles, qui ne sont pas sans rappeler ceux de Barnabooth. Ici l'auteur fait escale, rassemble ses souvenirs, met en ordre ses raisons de vivre :

Le souvenir tâte du pouce la mémoire
Et retrouve le point sensible à rappeler ;
L'homme se laisse aller dans cette chambre noire
Où pleure seulement le pauvre prisonnier.

Il fait en quelque sorte le point. Et si, dans les derniers poèmes, l'amertume ou la mélancolie, si le désir d'«ailleurs» plus doux et plus beaux, sont moins visibles ou exprimés moins directement, ils n'en sont pas moins présents. On ne peut manquer de songer que le
poète, et chacun de nous, passé le midi de la vie, nous sommes presque pareils à ce vieux pilote qu'il dépeint, assis dans un fauteuil, les pieds nus, regardant la rue où ne passe personne, rongé de souvenirs, et qui voudrait s'endormir pour ne se réveiller qu'au moment d'aller, à l'heure apéritive, reparler de l'ancienne marine avec d'autres vieux pilotes.