Est-ce vraiment l'authentique tête momifiée d'Henri IV que le photographe Boru a achetée pour trois francs à l'Hôtel Drouot? Cela n'est pas trop sûr. Ce qui est sûr, en revanche, c'est que le pauvre Boru, avant cette trouvaille, qui lui a donné une sorte de raison de vivre, n'avait connu que des désespoirs et des ratages. Qu'importe, après tout, l'objet d'une passion, si cette passion vous sauve?
Il semble que Roger Vercel, après avoir buriné tant de visages héroïques, ait voulu, ici, retracer les découragements pathétiques d'hommes et de femmes écrasés par leur destin.
Mais une fois indiquée cette parenté d'âmes, il faut signaler l'extrême diversité de ces nouvelles. On y retrouvera le décor si varié des romans de Vercel : villes du Proche-Orient, gorges des Balkans, brumes de Terre-Neuve, ruelles obscures de Bretagne. Les types, les milieux, l'accent même se renouvellent dans chacune.
Est-il besoin d'ajouter qu'à la lumière
concentrée de la nouvelle apparaissent avec un relief accusé les deux qualités maîtresses du grand écrivain disparu : le don de créer
la vie et celui d'enchaîner le lecteur au développement d'un récit qu'anime un irrésistible mouvement.