Il est rare, exceptionnel même, que des psychanalystes témoignent publiquement du parcours qui les a menés à devenir analystes. Chacun l'évoque ici dans la singularité de son histoire : Arlette Costecalde dit comment l'analyse a bouleversé jusqu'à sa pratique de psychiatre à laquelle elle n'a pas renoncé pour autant ; Ignacio Gárate-Mantínez comment il a pu renouer avec l'enfant tué en lui et découvrir in fine la trace du drame qui rendit folle son aïeule. Denise Lachaud voit dans la place de rebut qu'elle dut occuper, l'anticipation de celle du psychanalyste. Cosimo Trona ne peut revenir sur le cas de sa première patiente sans l'associer au souvenir de la procession des pénitents des Pouilles qui, lorsqu'il était enfant, le fascinait, métaphore du processus analytique avec ses pas en avant, pas en arrière et ses haltes.
Sur un autre versant, Patrick Delaroche et Alain Vanier réfléchissent sur les difficultés, voire les impasses, de la formation et du fonctionnement institutionnel auquel ils ont participé. Comme le rappelle Maud Mannoni dans son propos liminaire, il y a une sorte de contradiction entre institution et psychanalyse, qui ne peut se résoudre que grâce au discours dont elles se soutiennent. Car on ne commande pas à l'inconscient. Rien d'étonnant à ce qu'une crise secoue périodiquement les associations analytiques, plus encore lorsque les dérives partisanes ou politiciennes les agitent. Mais c'est la dialectique propre de la psychanalyse aujourd'hui, et qui doit tant au retour à Freud opéré par Jacques Lacan.