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Collection L'Imaginaire

Imaginons une collection de chefs-d'œuvre méconnus, oubliés, que le temps a éclipsé. Une collection de plus de 700 perles rares de la littérature mondiale du XXe siècle où Cortázar, Yourcenar, Perec côtoient Wharton, Apollinaire, Michaux et Leduc. Imaginons « L’Imaginaire », le pays fabuleux des inclassables, l’île au trésor des raretés littéraires qui, depuis 1977, s’impose comme la collection de réédition par excellence.

Chantal Akerman. Ma mère rit, Gallimard, 2021 (« L'Imaginaire »).

Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres, Gallimard, 2014 (« L'Imaginaire »). Maquette de 2021.

René Daumal, Le Mont Analogue, Gallimard, 1981 (« L'Imaginaire »). Maquette de 2021

Édouard Glissant. Le Quatrième Siècle, Gallimard, 2021 (« L'Imaginaire »).

Gisèle Halimi, Le Lait de l'oranger, Gallimard, 2021 (« L'Imaginaire »).

André Violis, Criquet, Gallimard, 2021 (« L'Imaginaire »).

Marguerite Yourcenar, Feux, Gallimard, 1993 (« L'Imaginaire »). Maquette de 2021.

Marguerite Yourcenar, Nouvelles orientales, Gallimard, 1978 (« L'Imaginaire »). Maquette de 2021

Dirigée aujourd’hui par Margot Gallimard, « L’Imaginaire » adopte un souffle plus moderne et plus féministe. Dès cette année, figurent au programme des œuvres aussi méconnues qu’incontournables, allant de Nathalie Barney (Les Nouvelles Pensées de l’Amazone), Andrée Viollis (Criquet) à Gisèle Halimi (Le Lait de l’oranger), Chantal Akerman ou encore Hélène Cixous.

Pour accompagner certaines nouveautés, la collection propose désormais un nouveau système : « 2 voix, 2 préfaces » écrites par des auteurs contemporains, des journalistes, essayistes, scénaristes, metteurs en scène, poètes etc., plus ou moins connus, afin de proposer au lecteur un regard croisé sur un même texte et lui donner quelques clés. Elles prennent des formes très différentes (poème, prélude, note ou présentation plus classique) : une belle manière de faire dialoguer les temporalités… Le passé s’adresse au présent.

Ainsi, Suzette Robichon et Félicia Viti préfacent Les Nouvelles Pensées de l’Amazone de Natalie Barney ; Constance Debré et Clémence Allezard Criquet d’Andrée Viollis ; Sabine Lancelin et Inès Tabarin Ma mère rit de Chantal Akerman ; Christiane Taubira et Mathieu Glissant Le Quatrième Siècle d’Édouard Glissant ; Jean-Baptiste Del Amo et Oscar Coop-Phane L’Incognito d' Hervé Guibert. D’autres pépites suivront bientôt en 2022 notamment une réédition de L’Atelier noir d’Annie Ernaux.

Création : 1977
Nombre de titres parus : 720
Nombre d'auteurs édités : 337 (hors collectif)

Le premier titre :
Raymond Queneau. Un rude hiver (avril 1977)

Toutes les parutions

« Ce n'est pas diminuer les autres collections de réimpressions que de constater que « L'Imaginaire » est la plus précieuse. Tout simplement parce que Gallimard extrait de sa caverne d'Ali Baba des trésors si rares que seuls quelques spécialistes en avaient gardé le souvenir. »
 (Pierre Lepape, Télérama, 9 mars 1983)

D'hier à aujourd'hui

C'est Antoine Gallimard, entré dans la maison familiale en 1972, qui crée « L'Imaginaire », alors désignée comme une collection « intermédiaire » entre les éditions courante et de poche. Les premières réflexions sur cette formule datent de 1974-1975 : comment maintenir disponibles ou faire revivre des titres du fonds, français ou étrangers, dont la notoriété n'est pas telle qu'elle autorise d'emblée une édition de poche en « Folio » ? On imagine dès lors une collection de semi-poche, commune à la fiction et aux essais. Finalement, deux collections sœurs sortent des presses : « Tel », première née en 1976, pour les sciences humaines et « L'imaginaire » pour la littérature. Tirage initial : dix mille exemplaires par titre ; prix de vente : légèrement supérieur à « Folio ».
Massin, directeur artistique, se souvient s'être attelé un 14 juillet [1976] à la maquette de la collection — dont il dit par ailleurs avoir proposé le titre, en entente avec Sartre. « C'est, se souvient-il, la couverture de toute ma carrière de graphiste » : format identique à celui de « Tel », sacro-saint fond blanc, logo contrasté mêlant fines antiques et puissant filet horizontal, exercice typographique coloré et expressif propre à chaque nouveau titre. La variation est à la source de l'identité formelle ; de nouveautés en réimpressions, de nombreux maquettistes y exercent leur talent, constituant par strate une singulière « typothèque ».
« L'imaginaire » annonce dès 1977 qu'elle s'ouvrira, « sans exclusive » à tous les fonds d'éditeurs ; façon de dire que le catalogue NRF ne fait pas l'essentiel de sa cohérence et que priment ses choix éditoriaux : « Que ces livres soient importants par leur réputation acquise maintenant par leurs auteurs, ou qu'ils l'aient été à l'époque, parfois de façon éphémère, ils sont les gestes ou les étapes d'une œuvre. » Il reste que plus de 85 % des titres de la collection sont issus du fonds Gallimard et 9 % de celui de ses filiales (Mercure, Denoël, La Table Ronde) ; les collections les plus sollicitées sont la « Blanche » (la moitié des titres), « Du Monde entier » (20 %) et « Le Chemin » (3 %), et très marginalement « La Croix du Sud », « Littératures soviétiques », « Les Classiques anglais » ou, plus récemment, « Connaissance de l'Orient ». Mais une des évolutions marquantes est de faire appel plus souvent à d'autres éditeurs, pour des auteurs français (Morand, Sollers) comme pour des traductions (Hardy, Townsend Warner, Wharton).

Notons que, de 1976 à 1990 et après 1999, la collection accueille un grand nombre de traductions ; dans l'intervalle (du n° 256 au n° 407), une autre collection intermédiaire, « L'Étrangère », s'y est substituée ; aujourd'hui, les réimpressions de cette dernière se font au sein de « L'Imaginaire ».
« L'Imaginaire » n'a jamais vu son rythme de parution faiblir depuis 1976, malgré une baisse globale des tirages moyens, vécue par tout le secteur : une vingtaine de nouveautés y paraissent chaque année. Les historiens de la littérature associent sa démarche éditoriale au mouvement de réhabilitation de certaines œuvres du milieu du siècle, également entrepris par de petits éditeurs, dans un certain esprit d'opposition à la production et au débat littéraires du moment ; les noms d'Alexis, Arland, Bernard, Bost, Bove, Calet, Dabit, Drieu, Gadenne, Guérin, Guilloux, Hardellet, Herbart, Nizan, Prévost sont cités comme exemple. Cette interprétation ne résiste guère à un examen plus attentif ; c'est mésestimer la part des littératures étrangères, notamment anglo-saxonnes (19 % des titres), des avant-gardes (Bataille, Blanchot, Burroughs, Des Forêts, Duras, Genet, Thomas), des marginalia (correspondances, chroniques) et surtout de toutes les orientations littéraires qui ont animé un siècle de littérature de recherche et de création à la NRF et dans ses filiales (Aragon, Leiris, Perec, Chaillou, Le Clézio…).

Brèves

  • Ils furent nombreux à être sollicités pour trouver un nom aux collections qui allaient devenir « Tel » et « L'Imaginaire » : Michel Butor proposa « Ici et Là » (« Ici » pour les essais, « Là » pour la littérature), Claude Roy pensa à « Elita », « Prior » et « Voix »… On retint d'abord « Paroles », en hommage à Prévert, pour préférer finalement, courant 1976, « L'Imaginaire ».
  • Avant de rejoindre « L'Imaginaire », une quarantaine de titres — de Calet, Drieu la Rochelle, Morand, Vilmorin… — sont d'abord passés en « Folio ». La réciproque est plus rare (Beaussant).
  • « L'Imaginaire » a proposé, par la voix des libraires, des hors série originaux à ses plus fidèles lecteurs : on se souvient encore du fac-similé d'un manuscrit de Céline en 1997.
  • « L'Imaginaire » et le cinéma ? L'édition de L'Après-midi de Monsieur Andesmas de Maguerite Duras, entré dans la collection dès 1979, a été reprise, avec une nouvelle couverture, et une bande annonçant la sortie dans les salles du film de Michelle Porte, avec Michel Bouquet et Miou Miou, présenté au Festival de Cannes 2004.

Les nationalités les plus représentées dans « L'Imaginaire »

France, 395 titres, soit 53 % du catalogue — États-Unis, 79 titres : Aiken, Bellow, Bowles, Caldwell, Capote, Dos Passos, Faulkner, Fitzgerald, Foote, Goyen, James, Mathews, Maxwell, Melville, Miller, O'Connor, Plath, Prokosch, Stein, Styron, Thoreau, Wharton… — Anglais, 63 titres : Austen, Brontë, Butler, Canetti, Chesterton, Compton-Burnett, Conrad, De Quincey, Du Maurier, Durrell, Firbank, Golding, Hardy, Keats, Kipling, D.H. Lawrence, T.E. Lawrence, Lowry, Murdoch, Naipaul, Radclyffe Hall, Rolfe, Swinburne, Wells… ;

Italie, 29 titres : Bassani, Bonaviri, Magris, Malaparte, Moravia, Ortese, Pasolini, Pavese, Pirandello, Savinio, Sciascia, Svevo, Vittorini… — Autriche, 25 titres : Bernhard, Broch, Handke, Hofmannsthal, Kafka, Kokoschka, Rilke, Joseph Roth — Allemagne, 19 titres : Döblin, Enzenberger, Jünger, Thomas Mann, Novalis, Salomon… — Russie, 15 titres : Babel, Bounine, Kazakov, Maïakovski, Pasternak, Tynianov, Zamiatine… — Argentine, 13 titres : Borges, Cortazar, Ocampo, Puig — Espagne, 13 titres : Cela, Dali, Marsé, Matute, Picasso, Rodoreda.

Informations commerciales

Format : 125 x 190 mm.
Nombre de titres disponibles : 699
Nombre de nouveautés dans l'année : 10
Ventes nettes annuelles : 136 354
Prix de vente moyen : 9,17 €
Nombre de réimpressions de titres du fonds dans l’année : 66
Les cinq meilleures ventes du fonds :
Marguerite Yourcenar, Nouvelles orientales
George Perec, W ou Le souvenir d'enfance
George Perec, La Disparition
Jorge Luis Borges, L'Aleph
Henri Michaux, Un barbare en Asie

Les données concernant les ventes, les prix publics (TTC) et les réimpressions sont représentatives des cinq dernières années.
Mise à jour : novembre 2021
© Éditions Gallimard