Les thèmes philosophiques ont toujours eu un rapport avec leur époque. Mais ce rapport était indirect, peu conscient, retrouvé seulement après coup par les historiens.
Il faut maintenant l'élever à la conscience. La pensée philosophique doit devenir l'expression directe et lucide de ce temps et de ses problèmes vitaux. Elle doit s'établir dans l'actualité.
Quel problème est plus urgent que celui du mensonge? L'opposition des thèses et des idées est telle, aujourd'hui, qu'une partie d'entre elles est nécessairement mensonge. Le fascisme ne peut être vrai en même temps que le communisme et la démocratie! Il faut admettre que le mensonge a pris une ampleur inconnue jusqu'ici. Le philosophe ne peut rester en dehors de cette situation. Il doit répondre à ces questions : «Où sont les dupes ? Comment fonctionne la conscience des dupes, la conscience mystifiée?».
Le problème de la connaissance doit être porté sur le plan social et actuel. Une raison accomplie ne luit pas sur le monde moderne. La relation de l'apparence avec la réalité, du connaître avec l'être, du vrai et du faux est plus complexe que ne le supposait le rationalisme...
Des événements semblent donner raison aux doctrines qui affirment le primat des rapports pratiques, économico-sociaux. Leur bouleversement a précédé et amené le bouleversement des idées. Et cependant ces idées sont loin de correspondre clairement aux faits économiques et à leurs exigences. Quel est donc le lien entre la conscience et ce dont elle est consciente? Comment s'opère la "prise de conscience" de la réalité économico·sociale?
Ce livre tente de déterminer les cadres d'une analyse des idéologies, et spécialement des erreurs idéologiques, en fonction de leur contenu historique et pratique.