Un grand Américain maigre, nommé Noël Field, ancien fonctionnaire du Département d'État et de la Société des Nations, sort du Palace Hôtel de Prague, un jour de 1949 et disparaît. Son frère, Hermann Field, architecte, part à sa recherche. Il disparaît à Varsovie. Herta, la femme de Noël, disparaît à son tour à Prague. Un an plus tard, Erika, jeune femme qui avait été élevée par les Field, disparaît elle aussi, à Berlin.
Quatre A méricains escamotés de la sorte, cela provoque un certain bruit. Mais, à toutes les démarches officielles, les autorités des pays de l'Est répondent qu'elles n'ont jamais entendu parler de ces Field.
Pourtant, Noël, Hermann, Herta et Erika étaient au secret et si on ne devait pas les revoir avant longtemps, leur nom allait revenir souvent, au moment des grandes purges staliniennes d'après la guerre. Le Hongrois Rajk, le Bulgare Kostov, les Tchèques Slansky et Clementis ont tous été condamnés, notamment, pour avoir été en rapports avec «l'espion américain Noël Field». Pendant la guerre d'Espagne et la deuxième guerre mondiale, Field, dirigeant des associations de bienfaisance, s'était surtout employé à secourir les réfugiés communistes. Il avait connu ou simplement croisé la plupart des militants qui allaient devenir les dirigeants des nouvelles Républiques populaires. Et maintenant il suffisait d'avoir connu Field pour être arrêté, exécuté ou déporté.
Dans le montage de l'affaire Field, il est prouvé que «Staline a mis la main à la pâte». Finalement, des dizaines de milliers de personnes ont été victimes de Field. Et l'on peut dire que cet Américain naïf et ennemi de toute violence a été «un fléau de l'histoire».
La grande journaliste Flora Lewis a mis plusieurs années pour démêler les fils de cette histoire vraie, plus fantastique que dix romans d'espionnage.