Trois nouvelles d'inégale étendue composent ce recueil. La Reine qui est en réalité un roman resserré à l'extrême, et dont l'action se situe dans les années 30, puis Barbara et Les Vivants et les Morts, qui se déroulent il y a plus d'un siècle. Mais leur trait commun est d'être des histoires d'amour – d'amour malheureux, contrarié ou refoulé. Et dans toutes les œuvres de Birgitta Trotzig, on le sait, les hommes, les femmes, les paysages ont quelque chose d'immuable.
Les personnages de ces trois récits semblent sortir de l'Ancien Testament. Ainsi, dans Barbara, le pasteur veuf, quinquagénaire, Maître Abraham, que l'ardente petite Barbara veut épouser et qu'il épouse en effet. La passion qui dévore sa toute jeune femme l'attire mais surtout l'épouvante, comme un gouffre. Il finira par se refuser à elle, par se barricader dans sa chambre, croyant ainsi se sauver et ne faisant que pousser Barbara au suicide.
Dans Les Vivants et les Morts, c'est une flamme aussi ravageante que réprime en lui l'oncle Salomon Kiebitz qui brûle d'amour pour son neveu Elis Nathanael.
Dans La Reine, Judit, la femme forte, n'a qu'un amour, mais il est double : son frère cadet Viktor et le domaine que ruine leur père Johan. Mais Viktor devient un vaurien, finit par émigrer en Amérique, où il mourra, non sans laisser une femme que Judit accueillera et dont elle fera à son tour, la «protégeant», son esclave. Il faudra que cette malheureuse, gagnée par la folie, ait un enfant d'un autre frère de Judit, Albert, être faible, également opprimé, pour que la Reine sache qu'elle n'a jamais aimé que la puissance.
Nous retrouvons ici l'île d'Oland, la mer, l'horizon plat de la lande grise et la grande faim des âmes, familiers aux lecteurs de Birgitta Trotzig.