Ce n'est certes pas l'indécision qui caractérise don Alvaro, le principal personnage de cette pièce en trois actes qui s'inscrit par sa simplicité, sa sobriété, son dépouillement et son action uniquement intérieure dans la ligne de Fils de personne. Don Alvaro, qui vit en Vieille-Castille, à Avila, au début du XVI^e siècle, et qui a une cinquantaine d'années, est un homme qui va jusqu'au bout de sa foi catholique, foi profonde et sérieuse. Un conflit naît de l'ardeur de cette foi, non pas en lui-même, mais en Mariana, sa fiIle, partagée
entre son amour filial et son amour de fiancée. L'amour filial l'emporte – et l'ardeur de la foi. L'auteur n'a pas fait d'Alvaro, dit-il, un chrétien modèle ; c'est presque, par instants, un pharisien. Il est, en tout cas, d'une forte vraisemblance historique. «La Castille du XVI^e siècle
a frappé le type de ces gentilhommes à la tête un peu étroite, qui, la cinquantaine passée, se retiraient du monde, avec leur foi tranchante, leur mépris de la réalité extérieure, leur goût de la ruine, leur fureur du rien.»