Jean dit «Doublecœur» sent s'agiter confusément en lui des germes de changement. Dans quelle direction, il serait en peine de le dire. Il a quarante ans, la profession romantique d'inspecteur des monuments et jardins, beaucoup de charme, du succès, et somme toute il est
heureux. Il lui semble cependant qu'il se dédouble, qu'une partie de lui-même cherche à s'arracher à l'autre.
En vacances avec la charmante Stella, il se laisse aller à des actions bizarres. Serait-il à l'aube d'une grande révolution interne? Il reçoit la visite de Coralie, puis fait un voyage de vingt-quatre heures à Paris où Estelle est en difficulté avec sa fille. Tout cela, qui est son existence même, lui semble lointain et étranger.
Et pourtant, il rejoint Stella, les vacances tirent à leur fin. Doublecœur n'a pas changé. Éternel songeur, il ne changera pas. Cette excursion à côté de lui-même l'en persuade avec mélancolie.
C'est toujours avec délectation que le lecteur
retrouve le Pierre Brisson de Sycorax, des Lunettes vertes et du Lierre, le conteur au scalpel
léger. Ce don de saisir, d'épingler pour nous des moments fugaces du cœur et de l'imagination que nous laissons s'envoler faute de temps et de compétence, Pierre Brisson le manifeste et l'affirme une fois de plus.