D'Istanbul à Fleury-Mérogis, des chambres de bonne aux luxueux appartements temporairement désertés par leurs parents, du Kaboul Hotel d'Amsterdam aux commissariats de police, de la Cinémathèque à l'hôpital de Marmottan, ils créent, au-delà
d'une génération nouvelle, une race nouvelle, avec ses lois secrètes, ses modes de vie, d'habillement, son langage pittoresque, et sa culture, ou plutôt contre-culture. Ils étonnent, déconcertent, effraient même parce qu'ils ont rejeté systématiquement les «adultes» dont ils se méfient, et tout ce qui se rattache au monde des adultes : morale, traditions, idéaux – aussi les adultes les tiennent-ils pour des primates ou des Martiens, sans se rendre compte qu'ils sont tenus à leur tour pour des troglodytes.
L'auteur ne cherche ni à justilfier ceux de ses héros qui ont choisi l'alcool, la drogue, la délinquance ou la révolte, ni à les juger. Il les laisse agir, parler, s'expliquer, délirer ; il les laisse exprimer pleinement leur désarroi intérieur, leur angoisse devant un monde qui leur paraît frappé de démence, leur dérive, leurs
élans romantiques, leur refus de «suivre le mouvement» en reproduisant les schémas du passé. Héritiers d'une société en pleine mutation, ils sont incompris, blâmés, condamnés. Alors, victimes d'un racisme qu'ils retournent contre ceux qui l'exercent, de même que les Noirs proclament : «Black is beautiful!», ils ont pris pour slogan : «Youth is beautiful!»